Colloque Idéologique International (Conakry, du 13 au 16 Novembre 1978). Thème Central: “l’Afrique en Marche”. Sous theme Nº 6: revolution et religion

104 Pages·1978·3.316 MB·French

by  Ahmed Sékou Touré

DT
UC-NRLF
30
C65
1978
B 4 975 479
v.6
DOCS
UCB

Parti - Etat de Guinée
Росс
Colloque Idéologique International
(Conakry, du 13au 16 Novembre 1978)
Thème Central : " l'Afrique en Marche"
SOUS THEME Nº6
REVOLUTION ET RELIGION
ParAhmed Sékou Touré
DOCUMENTSDEPARTMENT
APR301985
UNIVERSITLYIBORFACRAYLIFORNIA
RDA No 114
1.
Jn 353PG
15
REVOLUTION ET RELIGION
72225063
Does
DT30
C65
1978
V. L
Docs
OBJECTIFS DE LA REVOLUTION ET DE LA RELIGION
Au cours de l'Histoire, aucun mouvement révolution
naire conséquent n'a été indifférent au problème de rapport
entre la Révolution et la Religion. Et jusqu'aujourd'hui,
aucun n'a pu l'étudier de façon exhaustive et définiti
ve. Et ne pas s'occuper de ce problème mène, soit à l'inqui
sition, soit au sectarisme, soit à la « récupération » du
«
facteur << subjectif » par les éléments réactionnaires.
Aussi, n'entendons-nous pas, en abordant ce problème
complexe et objet de controverses séculaires qu'est celui des
rapports << Révolution et Religion », lui donner une solution
globale qui convienne à tous, encore moins mettre unterme
aux débats que suscite la seule évocation ou le simple rap
prochement des deux concepts. Nous voulons, plutôt, tenter
de traduire ce que, pendant plus de trente ans, la lutte con
crète du PDG au sein du Peuple de Guinée, nous a permis
d'acquérir et d'accumuler comme somme d'expériences et
aussi permis de tirer comme leçons du processus de notre
lutte révolutionnaire qui a collé aux réalités du Peuple, pour
les comprendre, les analyser, en vue de nous en servir com
me point d'appui pour une véritable transformation pro
gressiste de la société.
Nous essaierons donc, d'abord, de tenter des définitions
et ensuite, d'énumérer quelques propriétés caractéristiques
des deux concepts :
Nous entendons par Révolution Populaire et Démocra
tique, le mouvement collectif déclenché par un groupe
d'hommesoupartout unPeuple, et soutenupar leur volonté
consciente mise en oeuvre pour changer un ordre ancien
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rétrograde en un ordre nouveauprogressiste, en vue d'assu
rer, sans distinction aucune la sauvegarde et le développe
ment des intérêts collectifs et individuels. La Révolution
populaire et démocratique demeure ainsi, selon nous, une
conscience collective en mouvement et un mouvement col
lectif dirigé par la conscience dont la finalité est le progrès
continu de l'homme et du Peuple.
Le fait religieux a émergéaveclaconsciencehumaine et
d'elle. Il propose des réponses aux questions quese pose
l'homme dans l'angoisse de l'existence. Il anime et même,
dans certains cas, motive les comportements sociaux. Mais,
aujourd'hui, nous entendonspar Religion tout système cohé
rent de croyance qui véhicule des idéaux nobles et des va
leurs cardinales propresauprogrès collectif, au respectdela
dignitéhumaine et à la vertu de l'homme.
La Révolution populaire et démocratique fixe comme
but à l'action des hommes et des Peuples des objectifs pour
leur bonheur ici-bas, alors que la Religion fait prolonger
l'existence des hommes jusquedans l'au-delà et situe parfois,
dans un monde futur, la sanction positive ou négative cou
ronnant leur existence ici-bas. La Révolution ne s'attache
guère à nier ce monde futur ; elle veut simplement que la
lutte contre le mal, pour le progrès et le bonheur du Peuple
ne soit pas <<différée », « reportée », et c'est bien ce qu'exi
gent tous les croyants convaincus et tous les déshérités sans
distinction de sexe, de race et de nationalité.
La Révolution et la Religion demeurent donc caracté
risées par leur essence impersonnelle, leur universalité et
l'idéologie qui les situe dans la pensée socio-humaine ainsi
quedans la discipline et l'ordre qu'elles imposentaucompor
tement et à l'action des hommes.
Révolution et Religion ont des propriétés communes ;
ce sont des moyens d'éducation de l'individu en vue de lui
faire acquérir consciemment un comportement d'homme
libre et responsable de ses choix et actions. Autrement dit,
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personne n'est révolutionnaire contre son gré, tout comme
personne ne saurait, contre sa volonté, être l'incarnation et
l'interprête fidèle d'une Religion.
LaRévolutionet laReligion ont égalementdes postulats
communs et véhiculent des valeurs dont elles veulent que
les hommes deviennent les porteurs, mieux, les défenseurs
conscients, intraitables et convaincus. Atteindre un tel ob
jectif confère à ces valeurs une profonde signification socio
historique.. L'une et l'autre fixent une finalité à la vie
humaine, à l'existence de chaque individu, finalité à partir
de laquelle une sanction positive ou négative situe la valeur
à accorder à cette existence individuelle.
La Révolution et la Religion, à regarder de près, procla
ment toutes deux, la prééminence de la société, l'obligation
d'organiser la société, la nécessité pour chaque individu d'en
respecter la primauté dans l'appréciation des contradictions
entre l'intérêt collectif et l'intérêt individuel, ainsi que les
principes, les règles et les exigences de la vie quotidienne.
L'une et l'autre considèrent implicitement. sinon expli
citement et profondément, la Société comme le référentiel
suprême à partir duquel le degré d'utilité de l'individu est
apprécié et sanctionné.
L'une et l'autre s'expriment en l'homme par la foi qui,
comme une énergie de puissance infinie, sous-tend et galva
nise la manifestation de la vie humaine.
L'une et l'autre soulignent l'absolue nécessité, pour
chaque société, de réaliser, de défendre et de développer son
indépendance, sa souveraineté, son unité et sa morale, qui
doivent déterminer le comportement des individus.
L'une et l'autre défendent les valeurs communes qui
sont et demeurent des aspirations universelles pour tous les
hommes et tous les Peuples : la paix, la liberté, la justice,
l'égalité, le progrès, le bonheur. l'harmonie sociale, le vrai
et le beau.
L'une et l'autre considèrent certains biens comme
impersonnels ; il s'agit des biens attachés au patrimoine de
l'humanité que chaque adepte ou militant doit obligatoire
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ment respecter. Ces biens sont à la fois matériels et immaté
riels :lavie, ladignité, l'unitésinon lacohésiondela famille,
des groupes sociaux, de la Nation, de l'humanité, l'air, l'eau,
lalumière, le sol, le sous-sol, la faune, la flore, etc...
La Révolution et la Religion proclament, organisent et
conduisent une lutte permanente, lutte universelle qui est
pour la première la lutte de classes, la lutte entre des inté
rêts antagonistes représentés par des classes opposées dans
le processus de la production, de la distribution et de la
jouissancedesbiens créés par leshommes et, pourla seconde,
la lutte entre le bien et le mal, le bien incarnant le vrai, le
juste et le beau, et le mal, l'exploitation, l'aliénation, la
domination étrangère, le mensonge, le vol, l'arbitraire, bref,
toutce qui est contraire aubien.
Que les expressions «lutte de classes » et «<lutte entre
le bien et le mal» ne soient pas formulées dans les mêmes
termes, les mêmes concepts, ne change rien à leur significa
tion fondamentale, aux vérités qu'elles contiennent et véhi
culent et que les hommes ont à défendre dans la recherche
de leur bonheur collectif et individuel. Cela ne change rien
non plus à l'identité de leur objectif.
Quand la Révolution s'attaque au capitalisme, elle
identifie, elle matérialise par là ce que la Religion présente
sous le concept abstrait de mal social. La Révolution
et la Religion exigent, chacune, de ses militants. de ses
adeptes, une attitude de lutte durant l'existence; lutte sur
soi-même, contre l'égoïsme, les insuffisances et tous les
défauts ; lutte autour de soi pour le triomphe et le règne
de la justice sociale, de la vérité historique et sociale, de
la solidarité sociale et pour la concrétisation de l'égalité en
devoirs et en droits des individus, au sein d'une société
libre et harmonieuse.
En effet, les devoirs de la Révolution, tout comme les
devoirs religieux sont dictés à tous les hommes ayant foi
en la même idéologie, et ce, sans distinction de race, de
couleur, de sexe ou de fortune. La Révolution et la Religion
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