COLLOQUE La bourse Actes du colloque1 du 9 avril aujourd’hui : quelle 2015 organisé par Droit & Croissance2, le Centre attractivité pour les européen de droit et entreprises mais aussi économie3 - ESSEC et les épargnants ? CapitalCom4 sous la Évolution de la direction de Viviane réglementation, quête de Beaufort5 de sens, pédagogie... Intervenants:VivianedeBeaufort,Cindy Quelles réformes pour David,MarieEkeland,MarcLefèvre, l’avenir de la place CarolinedelaMarnierre,DidierMartin, FrankMartinLaprade,YannickPetit,Alain financière de Paris ? Pietrancosta,MichelPrada,Hubert Preschez,SébastienRaspiller,Patrick Renard,SophieVermeille,CarolineWeber6 AccueildeMonsieurdeForges DirecteurGénéralAdjointAG2RLaMondiale Voussouhaitantlabienvenuedanscetamphithéâtre,jesou- haite souligner l’actualité et le grand intérêt du thème de votreColloque:l’attractivitédelaplacedeParisetlefinan- cementdesentreprisesainsiquelaplacedudroitaucœurde cetteproblématique.Vousêtes,enplus,enpleineactualité, quand je vois le thème de votre 1re table ronde sur la loi Florange, alors que l’affaire Daily motion fait la une de la presse,jemedisqueceuxquipensentencorequeledroitest uneimageretardéedelavraievie,ontradicalementtort.Bien souvent le droit précède ou plus exactement il permet. Le droit et l’évolution du droit est en elle-même un élément capitaldeladynamiqueetdel’attractivitédesorganesécono- miquespourteloutelmoded’opérationouactivité;deleur matière grise d’abord, puis éventuellement de leur chair et leursmusclesensuite.L’attractivitédelaplacedeParisestde longuedateunsujetd’intérêtmajeurpourmoi,j’aieul’occa- siondel’évoquerdéjàsouventauprèsdeplusieursdesper- sonnes présentes aujourd’hui: le président Prada, Didier Martinetd’autres,croisésdansdiverscercles.Cetteproblé- ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1 ÀAG2RLaMondiale,Paris. 2 www.droitetcroissance.fr. 3 www.cede-essec.edu. 4 www.capitalcom.fr. 5 Professeurededroitàl’ESSECBS,fondatriceetco-directriceduCentre européendedroitetéconomie. 6 Avecl’aidedeGrégoireJouffroysuruneprisedenotesd’AudeBoisdron, Laurent-VictorClain,ClémenceComte,ClaireDeblock,HugoGirard, AugustinGridel,VladimirMaillot,BasmaMansouri,JuliaMichorzyk, étudiantsàl’ESSEC-cursusDroitetétudiantsduM2Juristed’affaires deParisXI-Sceaux. RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 3 COLLOQUE matiquedelacompétitivitédenotreplaceetnotammentde lution et sélection des projets. Les marchés financiers per- notre droit est centrale. Ma maison est heureuse de vous mettent également une amélioration du taux d’innovation accueillir,considéranteneffet,vusonpositionnementgéné- technologique,grâceàunemeilleureidentificationdesentre- ral,queledéveloppementdesactivitéséconomiquesetpar- preneursetpartant,unemeilleuresélectiondesentreprises. ticulièrement celui des investissements en France et par les Unlienestàfaireégalemententrelesmarchésfinancierset entreprises françaises est une clé de notre prospérité com- unemeilleuregouvernancedel’entreprise,cequiseconcré- mune. tise dans la mise en place de checks and balances. Il est primordialquedescontre-pouvoirsexistentauniveaupoli- Je vous souhaite d’excellents débats, je suis navré de ne tique,maiségalementàl’échelledel’entreprise.Soulignons pouvoiryassister,maisjenemanqueraidelirelesActesque aussi que les marchés financiers contribuent au développe- vousréaliserez. ment du commerce international. Dans cette période de grandevolatilité,lesmarchésfinancierspermettentgrâceaux produitsdérivés,d’accompagnernosentreprisesetdecouvrir Introduction un certain nombre de leurs risques. Enfin, et cela peut sur- prendre, les marchés financiers permettent de réduire un SophieVermeille certainnombred’inégalités,enparticulierdanslespaysdans PrésidentedeDroit&Croissance7 lesquelsl’accèsaucréditestdifficile.Lethèmedececolloque portedavantagesurlesmarchésdecapitauxequity,maisun Avantd’aborderlesthèmesrichesetvariésdececolloque,je parallèleestàdresseraveclesmarchésobligatairessurles- vousproposeunpetitretourenarrièreouplutôtuneprisede quels il y a de grands enjeux à l’heure actuelle, dans le hauteursurlafameusequestiondurapportentrelafinanceet contextedel’évolutiondenosinstitutionsbancaires. la croissance. La crise de 2008 a mis en lumière un certain nombre de phénomènes et de comportements: l’appât du Pourtoutescesraisons,lafinanceestaucœurdespréoccupa- gain,laquestiondelafinanceàcourtterme.Cettefinancequi tions deDroit et Croissance dont les réflexions portent sur présentaitcertainsaspectsnégatifsaprovoquédesexternali- sept domaines: law and finance qui est le sujet central tés,autrementditdescoûtspourlasociétéetquiontnécessité d’aujourd’hui,marchésdecapitaux;résolutionbancairedans quelesgouvernementsinterviennent,enparticulierpourrefi- l’Unioneuropéenne(DroitetCroissanceaétéconsultéparle nancer des établissements privés. Bien entendu, les régula- gouvernementilyadeuxansaumomentdudébatsurlaloide teursontessayéderéagiretlaquestionquiseposesouvent séparation des activités bancaires et en particulier sur les estdesavoirsilesrégulateurssouslapressiondespolitiques mécanismes de résolution des faillites bancaires); gouver- interviennent toujours au bon moment, trop vite ou trop nance d’entreprise; restructuration financière et opération- lentement. Dans le contexte de 2008, compte tenu de nelle:noussommestrèsimpliquéssurlaréformedudroitdes l’ampleurdecettecriseetdesoncoût,l’envieaétéfortede faillites;PMEetinnovation;concurrence;smartrégulation régulertrèsrapidement,parfoispeut-êtretropvite.Enpre- (commentcréerlesoutilsprocessuelsadaptéspourcréerla nantunpeudereculaujourd’hui,ons’aperçoitquelechemin bonnenorme). empruntén’étaitpassimal.Pourquececheminmènevers unerégulationefficace,uneconjonctiond’effortsentrejuris- Je remercie mes deux partenaires du colloque: le Centre tes,financiersetéconomistesestrequise.C’estprécisément européendedroitetéconomiedel’ESSECdirigéparViviane l’objetduthinktankDroitetCroissancequipartduconstat deBeaufort et CapitalCom dirigé par Caroline de la Mar- quepourparveniràmieuxrégulerlesmarchésfinanciers,il nierreainsiquetousnossoutiens. estcapitaldetravaillerensemble,nousautresjuristes,écono- mistesetfinanciers. Propos introductif J’aibienconscienced’avoir,àcestadedemonintervention, présentéunvisagebiennégatifdelafinance,etjen’enresterai MichelPrada paslà.Onaoubliéquelafinancefavoriselacroissance.Au Président du Haut comité juridique de la place financière même titre que le droit, elle est un rouage qui, si elle ne deParisetduCNOCPauMinistèredubudget,descomptes participepasfondamentalementàlacréationdelacroissance, publics,delafonctionpubliqueetdelaréformed’État celle-cireposant,selonleséconomistes,surl’investissement dans le capital humain et physique, demeure essentiel. Les CetteinterventionmepermettradeprésenterleHautcomité économistessesontd’ailleursdemandésilacroissancepou- juridique de la place financière deParis dont je viens de vaitexistersurlelongtermesanslafinanceetsilesmarchés prendre la présidence et, en cette occasion de rappeler financierscontribuaientàlacroissance. l’importance d’un droit performant pour l’attractivité de notreplacefinancière;ils’agitmoinspourmoidetraiterles Les marchés financiers permettent, en effet, une allocation sujetsdefondsquevousaborderezquedeprésenteràtravers plus efficace du capital, une meilleure information et per- nosobjectifsetnosméthodes,laquestiondelacontribution mettentdesélectionnerlesprojetslesplusprometteurs.Cela de notre droit à la compétitivité de notre place. Le Haut participe à l’idée très chère à Droit et Croissance selon comité est le fruit d’une réflexion qui a cheminé, depuis laquelle,ilfautfavoriserladestructioncréatrice,c’est-à-dire quelquesannées,conduiteparquelquesexcellentsjuristesen lerenouvellementdanslaperspectived’uneperpétuelleévo- coopérationaveclesautoritésfinancières:l’AMF,laChan- cellerie, la Banque deFrance, l’ACPR, le Trésor, etc. Le ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• Haut comité juridique de la place deParis qui vient d’être 7 Droit&Croissance(RulesforGrowth)estuninstitutindépendantouvert constitués’inspiredecertainsexemplesétrangers:leFMLC auxjuristes,économistesetacteursprivésayantpourobjectifdenourrir londonienetlescomitésanaloguesdeNewYork,Tokyoet lesdébatsdelasociétécivilepourfairevaloirl’analyseéconomiquedu Francfort.Ils’agiteneffetdeprendreencomptelanouvelle droitcommevecteurd’efficienceéconomique.Lethinktankréalisedes donne de l’environnement juridique dans laquelle s’inscrit étudesetinterpellelesdécideursenportantsesexpertises.www.droitet- croissance.fr l’évolutiondesmarchésfinanciers:globalisation,intégration RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 4 COLLOQUE européenne,notammentprojetd’intégrationdesmarchésde pratique et de l’optimisation de nos textes et qui produit capitaux,etc. régulièrement des propositions d’amendement immédiate- mentopérationnelles,noussouhaitonsnouslivreràdesana- Plusieurscerclesderéflexionexistentd’oresetdéjàquifont lysesfondamentales.Nousavonspourambitionderéexami- unexcellenttravail,dontDroitetCroissanceestl’undesplus ner les équilibres quasi philosophiques qui régissent notre actifs, Paris Europlace a également fondé un comité Droit droit au regard, par exemple, de l’arbitrage entre sécurité, quej’ail’honneurdeprésiderquiafourninombredepropo- innovation et effet de levier; rapport entre créancier, débi- sitionsutilespourfaireévoluernotredroitfinancier.L’apport teuretautrespartiesprenantes;concurrenceetorganisation spécifiqueduHautcomitéestderéunir,souslesauspicesdes desmétiersetdesprofessions. régulateurs(AMF,BanquedeFrance),desindividuschoisis exclusivementàraisondeleurscompétences,ilnecomporte Notre réflexion s’inscrira dans le long terme et pourra pas de représentation professionnelle. Nous réunissons conduire,selonlecasàproposerdesréformesprofondesouà aujourd’hui treize membres: avocats, magistrats, praticiens articulerdesargumentairessolidesdedéfenseetillustration de l’entreprise, universitaires, dont certains sont d’ailleurs du droit français à valoriser dans les débats européens et parminouscematin.Nosstatutspermettentunélargissement internationaux. Quant à la méthode, nous souhaitons nous limitéquipourraitpermettrederenforcerlaprésenced’opé- démarquer des approches tactiques et opportunistes, au rationnels ou d’économistes ou financiers. Les autorités de demeurant nécessaires dans certains cas, qui caractérisent placequiparrainentlecomitéetenassurentlalogistiquesont trop souvent les processus législatifs et réglementaires. Il associéesànosréunionsetànosdélibérations.GérardGar- s’agira en premier lieu de réexaminer la cohérence de nos dellaquiétaitdirecteurjuridiqueàlaSociétéGénéraleestle systèmes, d’évaluer les principes et arbitrages qui les sous- secrétairegénéraldenotreHautcomitéetenassurel’admi- tendentetd’identifierlesscoriesquel’histoireapugreffersur nistration. lesarchitecturesinitialesaupointd’enalourdiroud’enalté- rerlafonctionnalité. Quantàsesobjectifs,leHautcomité,quis’estdéjàréunien deuxoccasions,depuissacréationrécente,aadoptédélibéré- Noussouhaitonsaussicontribueràremédieràcequiapparaît mentuneapprocheambitieuse.Ilentendrevisiterlesgrands commeunetriplefaiblesseméthodologique,observéedansà sujetsqueposel’ouverturedelaplacedeParisàuneconcur- ladémarchenormativedenotrepays: rencetoujoursplusvivedelapartdenospartenaireseuro- péens et internationaux. Il s’agit d’analyser les données –la séparation des approches juridiques et économiques, d’environnement de cette concurrence, par-delà les problé- paradoxed’unpaysquis’estdelonguedatedotédefacultés matiques des rapports de force entre les acteurs, et de dedroitetdescienceséconomiques.Ilnousfautréintégrer confronterlaperformancerelativedesdispositifsjuridiques lalogiquejuridiqueetl’analysequantitativeetmobiliserà quirégissentleursactivitésetleurcapacitéd’innovation. cette fin, nos chercheurs regroupés dans les laboratoires d’excellence. Noussouhaitonsaborderdemanièrefondamentalecertains sujets,identifiésdelonguedate,maisrarementconsidérésde –larelativeméconnaissancedudroitdespaysconcurrents,de manière synthétique, tant il semble parfois impossible de leursavantagesetdeleurshandicaps.Ilconvientd’êtreplus s’attaqueraux«monuments»denotredroit.Noussommes rigoureux dans nos analyses, d’établir, le cas échéant, des égalementàladispositiondenosautoritésquisouhaiteraient partenariats avec nos homologues afin de confirmer nos éventuellementenurgencerecueillirnotreavissurcertaines vuesoud’identifierdesmytheséventuels,voireredécouvrir questions,commecelasepratiquenotammentauRoyaume- etvalorisernosavantagescompétitifs. Uni. Afindedémarrervite,nousavonsétabliunagendaendeux –lemanqued’analysesystématiquedel’impactd’éventuelles étapes. réformes.C’estunsujetdifficilemaisessentiel.Ilestimpor- tantdedépasserlesaviscontrairesetlesconflitsd’intérêts Lapremièreétapeaprisencomptelaréflexiondenosmem- quiaffleurentdansunpremiertemps,conflitsdontlaviva- bresetdenosparrainsetelleapermisd’identifiertroissujets citémettropsouventenpérillesréformes.Ilfautallerplus immédiatementprisenchargepartroisgroupesdetravail: loinetmesurer,voiretraiteràl’avance,leseffetssecondai- respournepasrenonceràl’essentiel.Lesvicissitudeslégis- –lacompétitivitédenotredroitdutitre; lativesrécentesillustrentl’importancedecettedémarche. Vous l’aurez compris notre ambition est grande, mais les –laquestiondumonopolebancaire; qualitésetl’enthousiasmedesmembresduHautComitéle –la méthodologie des processus de réforme législative et sontaussi.Nousallonsmobiliserlesexpertsetlesacteursde réglementaire. la place. Je me réjouis d’avoir pu mettre à profit cette tribunepourvousprésenternotreaction. Ladeuxièmeétapeestencours:elleconsisteenunappelà projets,lancéauprèsdeplusde80correspondants:grandes entreprises cotées, associations professionnelles, auxquelles Table ronde 1 : L’attractivité nousavonsdemandéd’identifierlesfacteursderisquepourla de la France en matière d’OPA suite compétitivité de la place qui pourraient à l’extrême les conduireàs’enéloigner,ainsiquelesréformesenvisageables à la loi Florange danscertainsdomainesdudroitfinancier.Sanspréjugerde nos conclusions à l’issue de cette consultation, il y a fort à AniméeparVivianedeBeaufort,professeureàl’ESSECBS, parierqueledroitdesfaillitesfiguredanscecatalogue. co-directriceduCentreeuropéendedroitetéconomie8. Àladifférencedel’excellenttravailduComitéDroitdeParis ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• Europlacequis’inscritdanslaperspectivedel’aménagement 8 LeCEDEcrééàl’ESSECen2008estunCentrederecherches–Think RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 5 COLLOQUE InterventiondeVivianedeBeaufort conceptsmajeurs,telsquel’intérêtsocial,lerôledesaction- naires,ladémocratieactionnariale,lerôledesdirigeants,etc. Je suis heureuse et honorée d’être là aujourd’hui et d’être Quelétaitledroitfrançaisenlamatièreaprèslatranscription arrivéeàorganisercecolloque,partid’unprojetquejeporte de la directive et quelles modifications sont intervenues à depuis des mois au sein du Centre européen de droit et l’aunedelaloiFlorange?Quellesconséquencespotentielles économie et que j’ai pu proposer à Droit & Croissance en surl’attractivitérelativedelaplacedeParisenlamatière– octobre, puis un peu plus tard à CapitalCom qui nous a versus la réglementation a-t-elle atteint un juste équilibre rejoint.Entrenotreidéededépartetaujourd’huicesujetde entrelibrejeudumarchéetprotectiondesentreprisescontre fondetsensibleredevenaitunsujetdegrandeactualité.Merci depossiblesabus? donc à nos partenaires, un remerciement spécial aux étu- diantsdel’ESSECquisontenchargedelaprisedenotes,ces Présentonsrapidementlesmodèlesdedroitetlespratiques jeunessontnostalentsdedemain. enEurope.Jebaseraimespropossurunecomparaisoneffec- tuéeauCEDEavecuneéquipeESSEC-Droit,sur130socié- Jedoisavouerquej’aiuneappétenceparticulièresurlethème tésémanantde15Étatsmembresetsurunepériodedeplus desOPAayant,ensontemps,réalisémathèsesurl’harmoni- detroisans,étudeterrainquiapermisd’identifierconcrète- sationdesOPA(depréférencehostiles)endroitcomparéet ment à quels dispositifs anti-Opa les sociétés européennes européenetparsuite,publiépasmalsurcesujet,entreautres, recourentleplusvolontiers;(voirenAnnexe).Puis,jedon- en 2006: «Governance in the age of takeover bids»9: une nerailaparoleànostroisexpertsetamispourtenterdefaire sommecomparativedudroitdes(25àl’époque)Étatsmem- unétatdudroitdepuislatranspositionenFrancedeladirec- bresqui,commesontitrel’indique,faitunlienentrelesOPAet tiveOPAetplusprécisément,jevaismepermettrededeman- l’interpellationmajeuredegouvernancedesentreprisesparties derà: àl’opération.Dansl’idéedetrouverl’inspiration,cematin,je relisais la préface que Pascal Lamy a accepté de faire à cet -DidierMartin,sonanalysedesdispositifsanti-OPAliésàla ouvrage,ilysoulignaitlacrisedegouvernancemajeurequ’une loivisantàreconquérirl’économieréellediteloiFlorangeet entreprise vit en cas d’OPA hostile, du moins vécue comme sonsentimentquantàceuxsusceptiblesdeposerproblèmeen telleparlesdirigeants,etpeut-êtreégalementlessalariés,et/ou termes d’attractivité des investisseurs étrangers. On a à ce pasforcémentlesactionnaires. jour encore peu de recul, mais j’avoue envisager qu’il soit possible que la loi Florange soit simplement un quasi non- Voilà le cœur de notre sujet: qui décide qu’une OPA est événement, même si elle a défrayé la chronique, non- hostile,lemanagementoulesactionnaires?Quipeutréagir évènementhorsdeFrances’entend. et dans quelles conditions? Quel est l’état du droit en la matière et ses conséquences? Je propose pour tenter de -Hubert Preschez, d’évoquer plusieurs affaires dont le répondre à ces questions essentielles d’utiliser un déroule- rocambolesqueépisodedel’OPAClubMedetsaperception mentenentonnoir,parcequec’estuneapprocheassezpéda- desconséquencespotentiellesdesdispositionsdelaloiFlo- gogique.Autrementdit,nousallonspartird’uncadragegéné- rangesurledéroulementdesOPA. ralquejevaisréaliser,àéchelleeuropéenne,carlethèmedu colloqueétantl’attractivitédenotreplace,ils’agitd’êtreen -Caroline de la Marnierre, d’utiliser les données tirées du mesure de comparer quelque peu les droits en la matière, Grand Prix de l’AG sur les dispositifs de la loi Florange. pourarriveràunproposplusprécissurlesmodificationsdu CommentlesentreprisesdésormaissoumisesàlaloiFlorange droitfrançaisdécoulantdelaloiFlorangedu29mars201410, ont-ellesen2014etvont-ellesen2015proposeretfairevoter puis illustrer les conséquences potentielles de ce nouveau des résolution visant à contrer la généralisation des double droitavecdescas,notammentceluidel’OPAClubMedet, droitsdevoteet/oudesdispositifspréventifsd’OPApermet- enfin mesurer ce qui a pu se passer en 2014 et se passera tantàladirectionderéagirunefoisl’offredéclenchée,telsles pendantlapériodedesAGgrâceàuneanalysedesRésolu- bonsBreton11?Ya-t-ilunimpact?Quelest-il? tionsproposéespourcontrerl’effetdelaloiFlorange. Bref rappel sur les modèles en Europe, après la Directive Aprèsunelonguepérioded’atonie,lesOPA,contexteécono- OPA de 200412, adoptée après 14ans de débats et diverses miqueoblige,sontderetourdepuis18mois,etdesquestions moutures,posedifférentsgrandsprincipesessentiels: enfouiescestempsciressurgissent:quidécidequ’uneOPA esthostileetquipeutréagir?Quelssontlesdispositifsanti- –laneutralitédumanagement(article9); Opaefficaces,sitantestqu’ilpuisseyenavoir?Jusqu’oùla DirectiveOPAde2004a(oun’apas)donnéderéponsesen –la limitation des dispositifs anti-OPA préventifs, une fois procédantàl’harmonisationdecesquestions?Lespratiques l’acquéreurdisposantd’unseuildecontrôleimportant(arti- etledroitdiffèrententreÉtatsmembres,parcequelestradi- cle11); tions de gouvernance sont diverses, notamment sur des –uneexigencedetransparence(article10). ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• tankquitravaillesurlesthèmestouchantàl’économieetaudroitdansune Cependant,aunomduprincipedesubsidiarité,exceptéquant perspective transversale et comparative. Il s’intéresse particulièrement auxincidencesdelaglobalisationsurl’environnementinternationaldes auxrèglesdetransparencequis’imposent,cesprincipeseuro- entreprisesetdesÉtats.Documentsderecherche,ouvrages,colloques permettentdeconfronterl’étatdelarechercheauterrainpourtenterde ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• faireévoluerlanorme.C’estégalementunCentred’enseignementstrans- 11 Loidu31mars2006àl’initiativedeThierryBreton,les«bonsBreton» versauxetd’échangesentreacadémiquesetpraticiens(CERCLES)et permettent à une entreprise d’augmenter son capital en cours d’offre d’expertises.www.cede-essec.edu publiqueenproposantàsesactionnairesdesbonsdesouscriptionàpetits 9 «GovernanceintheageofTakeoverbids»,préfacePascalLamy,Éditions prix,demanièreàenrenchérirlecoûtpourl’initiateurdel’offreenraison anglaises-Economica,Avril2009,ISBN978-27178-5715-3 deladilutionducapital.IlsdoiventêtreautorisésenAGpourunedurée de18moismaximumetunmontantdecapitalprécisé. 10 Loivisantàreconquérirl’économieréelle,troisièmevolet:«Mesuresen faveurdel’actionnariatdelongterme». 12 Directive2004/25/ECof21April2004surlesOPA RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 6 COLLOQUE péenspeuventfairel’objetd’optingout:c’estl’article12du limitedel’intérêtsocialdelasociété»13?Quelestlepoidsdu nom étrange en droit, mais assez parlant d’«Arrangements marché et notamment des agences de conseils en vote (les facultatifs». De plus, les États peuvent choisir d’utiliser le proxyadvisors)àcetégard?...N’oublionspasquelesentre- principederéciprocité:pourfairesimple,encecas,etc’estle prises sont d’abord soumises à une logique économique et choixdelaFrance,siuneentrepriseestlacibled’uninitiateur soucieusesd’attirerdescapitaux,mêmedansdesÉtatsoùla lui-même non-opéable, elle aura le droit d’agir pour éviter loietlaculturepermettentdesdispositifsanti-OPA,laplu- une prise de contrôle qualifiée par la direction d’hostile, partd’entreellesontlimitéceux-ci,dumoinslesplusvisibles. notammentlorsdel’avisofficielquedélivreleconseil(arti- L’étudecomparéeréaliséeauCEDE-ESSECquej’évoquais cle9). permetd’identifierau-delàdesdifférencesentrepayset/ou entreprise, une évolution: certaines «poison pills» sont en Ainsiilestpermisdedistinguer,parmiles27Étatsmembres vogue: les dispositifs contractuels de cession d’actifs ou (il me manque la Croatie), quatre groupes de pays selon le d’endettementquinousviennentdesUSAetonttrèslarge- mentprisenEuropeou/etlesdispositifsquipermettentau typedetransposition: management de réagir avec des autorisations anticipées d’augmentation de capital, tandis que ceux qui s’attaquent –lespaysbaltes,lespluslibérauxquivontrespecterlesarti- directementàladémocratieactionnarialesontabandonnés. cles9 et 11 et ne pas utiliser la réciprocité: neutralité du management et pas de dispositifs préventifs. Ils avaient Alors,DidierMartin,dansuncontextederelancedesOPA, besoind’attirerlescapitauxet,defait,onattirepasmalde depuis juillet 2013, relance qui s’explique par le contexte capital(d’originerusse)! économique:valorisationtrèsraisonnabledesentrepriseset du crédit, le dispositif de la loi Florange: concrètement, –lespaysanglo-saxonquiconsacrentlaneutralitédumana- qu’est-ce que cela change et n’est-il pas mal perçu par les gement: la parole est aux actionnaires mais, qu’on ne s’y investisseurs? trompe pas, tolèrent certains dispositifs anti-OPA, essen- tiellementd’originecontractuelled’ailleurs:desclausesde InterventiondeDidierMartin14 changementdecontrôle(lorsqu’estviséunactifcommeun AssociéaucabinetBredinPrat contratdelicencedebrevetoudescontratsd’endettement avecuneclausederemboursementanticipé); Laréformerécentedesoffrespubliquesetd’autresmesures prisesdemanièrequasiconcomitantesontintervenuesdans un débat qui, à l’origine, a eu du mal à être mesuré: une –le groupe rhénan (dont le grand champion sont les Pays- initiativedugouvernementetduparlementinspiréeparune Bas,leDelawareeuropéen)oùlalogiquedegouvernance visionassezhostiledesOPA,ensensinversedesréactionsde collectivepermetl’organisationdepréventionsassezcréa- la place dramatisant cette intervention. Après pas mal de tives et qu’au nom de «l’intérêt stratégique de l’entre- débatsetdesmodifications,lestextesauxquelsonaaboutine prise», le Directoire en accord avec le Conseil de sur- sontpasaussiextrêmesqu’onauraitpulecroireetquecequi veillance(structureduale)puisseprendredesmesuresassez apuenêtredit.LaloiFlorangeest,commesouvent,interve- musclées, une fois l’offre déclenchée (augmentation de nueàlasuited’affairesmédiatiques:jepenseàl’offrepubli- capitalsansAG); quedugroupeMittalsurArcelor,intervenueaumomentde latranscriptiondeladirectivesurlesOPAetquiestenpartie –leslatins(plusunepetitepartiedel’Europecentrale),dont àl’originedeschoixquiontpuêtreréalisés,l’affaireGEavec laFrance.LaFrancen’aenfaitpasunmodèletypeclaire- uneréactionsurlalégislationdesinvestissementsétrangers; mentetempruntedesdispositifsàl’unoul’autresystème;à laloiFlorangeportesansdoutelesceaudesmenacessuppo- lacléunsystèmesouventcomplexeetàl’équilibrefragile. sées contre certains fleurons français. Je voudrais évoquer Cesystèmeunpeu«bâtard»fortintéressantaudemeurant, troisdispositionsprécisesdelaloiFlorange:lesdroitsdevote s’expliqueparlefaitquelecapitaldenossociétésesttrès double;laconsultationducomitéd’entreprise(CE)etlerôle internationalisé:ils’agitdoncderespecterlesexigenceset duCAetdeuxautresdispositifsquinesontpasissusdutexte. lesattentesdesinvestisseurssouventanglo-saxons.Dansle mêmetemps,perdurentunrôletraditionnellementfortde u Droitsdevotedouble la direction et des actionnaires contrôlant (par exemple famille fondatrice) et un droit du travail qui permet aux L’objectifaffichéestdedonneruneinfluenceplusgrandeaux syndicatsd’exercerunecertainepression. actionnairesfidèles,parl’octroiautomatiquededroitsdevote double pour les actionnaires détenant leurs actions depuis plusdedeuxans.Certainsontpuyvoirunemesureintéres- C’est à l’aune de ce système en équilibre fragile qu’il faut santdirectementlegouvernement,unequasiinstrumentali- jugerlesdispositifsFlorange.Parexemple,quiddelasysté- sationauxfinsd’intérêtpublic,delaloiparl’Étatactionnaire matisationdudroitdevotedoublepourlestitresdesociétés quipourraitlimitersaparticipation,àterme,toutendemeu- cotéesdétenusdepuisdeuxansaunominatifqui«encourage rantunactionnaireinfluentdufaitdesdoublesdroitsdevote l’actionnariatdelongtermeenlerécompensant»?Ledouble droitdevoteaététoléréparl’Unioneuropéenne,aprèsun ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• débat difficile dans les années 2002, comme dispositif de 13 ArticleL.233-32duCodedecommerce.Pendantlapérioded’offrepubli- fidélisationdesactionnairesàtitred’exception,carilcontre- quevisantunesociétédontlesactionssontadmisesauxnégociationssur ditleprincipe«untitre-unevoix»,assezlargementpartagé unmarchéréglementé,leConseild’administrationouleDirectoire,après (mêmesiilyadesexceptionsnotableségalementenScandi- autorisationduConseildesurveillance,«peutprendretoutedécisiondont navie). Les sociétés proposent-elles, au final, une non- lamiseenœuvreestsusceptibledefaireéchouerl’offre,sousréservedes pouvoirsexpressémentattribuésauxassembléesgénéralesdanslalimitede systématisationdudoubledroitdevoteauxactionnaireslors l’intérêtsocialdelasociété». desAG,refusantd’allerdanslesensdelaloi?Qu’enest-ilde 14 Voirnotammentl’article«OPA:illustrationdesincertitudes«madein l’autorisationdecontreruneOPA«sousréserve–précisons- France»»avecMathieuFrancon,inCahiersdeDroitdel’entrepriseN°6, le – des pouvoirs attribués aux assemblées générales dans la novembre2014,dossier36. RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 7 COLLOQUE qu’ildétient.Cetoctroiautomatiquedesdroitsdevotedou- resquiontpourobjetoupoureffet,defaireéchouerl’offre. blepeutêtrecontrésilesactionnairesvotentunerésolution Autrementdit,l’assembléen’estplussouveraine.Ceciesten de rejet, à la majorité qualifiée des deux tiers. Une grande faitéminemmentthéorique.L’examendesrésolutionsmon- sociétécotéefaitencemomentl’objetd’unteldébatentre trequetouteslesdécisionsmajeuresquichangentladonne actionnaires,etilestpossiblequ’unactionnairedisposantde sontprisesetvontcontinueràêtreprisessurautorisationou 15%ducapitaldotédedroitsdevotedoublepuissedisposer délégationdel’assembléegénérale;lesagencesdeconseilen d’un contrôle de fait, s’il est impossible aux autres action- votenotammentsontopposéesàl’octroidetellesdélégations nairesnesouhaitantpascedéploiementdesdoublesdroitsde auxconseils,parexemplelesBonsBretonsontquasidisparu. voted’atteindreles2/3.Ainsi,sicedispositifdelaloiFlorange Ilyaunepressionassezfortepourqu’encasdedélégation,il s’applique,onauneinversiondelogiqueaveclaquelleilva soitprécisé,lorsqu’ilyadesdélégations,quecelles-cisautent falloir vivre. Ça n’est pas négligeable d’ailleurs, car en cas enpérioded’offre.Àpartirdelà,leCA,c’estunpeuleroinu. d’offrepublique,larègleprévoitqu’undéfenseurpeutinter- Même, lorsque le Conseil peut changer la donne, ceux qui venir sur le marché jusqu’au seuil de déclenchement d’une décidentcesonttoujourslesactionnaires.Souvenons-nousde offreobligatoire;or,àpartirdumomentoùiln’apasl’inten- l’affaireABNAmro,oùauxPaysBas,leDirectoireavecle tiondeprendrelecontrôlecequiluiestdésormaisdemandé Conseildesurveillancesesontreconnuslégitimespourcéder de préciser, il peut intervenir sur le titre sans déclencher unactifmajeur(techniquedescrownjewels)et,alorsmême d’offreobligatoire.Or,dansdessociétéscotées,oùilyaune que la Cour suprême a reconnu le droit de prendre cette présence d’actionnaires significatifs dotés de doubles droits décision, l’initiateur n’a pas renoncé à l’offre et les action- devote,articuléeavecundéfenseurachetantdestitressurle naires ont eu le dernier mot: ABN Amro a été pris sous marché,ilpourraitêtresingulièrementdifficileàuninitiateur contrôleetdémantelé.C’estuneréalitéincontournable,les d’atteindreleseuildecontrôledes2/3permettantunemodi- actionnairesontlederniermot,onpeutleregretter(ounon), ficationdesstatuts. maisc’estainsi.Ainsi,laloiFlorangenedevraitpasentrainer demodificationmajeuredelapratiqueantérieure,actéelors u Consultationducomitéd’entreprise ladirectivesurlesOPA,voiremêmeavant,carilyatoujours eu une pression sur les conseils pour qu’ils soient le plus Le second sujet important est celui concernant le rôle des neutrespossibleauregarddel’intérêtdesactionnaires:l’AG salariés.Laloiimposedésormaisuneconsultationducomité demeuresouveraine,horscastrèsexceptionnels.Enréalité, d’entrepriseoucomitédegroupeavantqueleconseild’admi- enFrance,parADN,lespouvoirspublicsontunrôlemajeur nistrationnedélibèreformellementsurl’offrepubliqueetne etlesassociationsd’actionnairespassenttoutàfaitàcotéde délivrel’avisofficiel.Commesouventavecledroitdutravail cetteréalité:lesassociationsd’actionnairessouhaitentéviter pourlessociétéscotées,ilyaunfaux-semblant:lemarchéne ladélégation,doncleconseild’administrationn’apaslepou- peutpasvivrependantunmoissansl’avisdelasociété,donc voirdechoisircequiluisembleopportunlemomentvenu. celui-ci interviendra inévitablement officieusement sous Alors, si on reprend le maillage du contrôle des investisse- forme d’un communiqué court qui donne le ton. Le terme ments étrangers et des secteurs sensibles, le sort de l’offre consultationestd’ailleursimpropre,carlorsquevouslancez publique va plus souvent dépendre des discussions avec les uneoffrevousnedisposezpasnécessairementdel’ensemble pouvoirs publics que des décisions du conseil d’administra- desélémentspourdéfinirvosmesuresderestructuration,or, tion. Il est ainsi curieux que les associations d’actionnaires lessalariéssontcensésêtreinformésetsollicitéspourdonner dépossèdent le conseil de possibilités d’action, car les pou- un avis sur des projets déterminés de restructuration ou voirspublicsontleurpropremissioncelledepréserverl’inté- d’évolutiondel’emploidanslegroupe.Ilyadoncpeutêtre rêtgénéraletpascelledel’intérêtdelasociétéconcernéeet uneconfusionsurlerôleréeldessalariés. des actionnaires. Les négociations qui interviennent entre l’initiateur et les pouvoirs publics, au titre du contrôle des HubertPreschezintervientpoursoulignerlerisquedeblo- secteurs sensibles, peuvent générer des arrangements lors cageliéàcenouveaudispositif,soulignantquecequ’ilavécu d’une opération qui seront compatibles avec l’intérêt de danslasphèrepubliquelorsdelafusionGDF-Suezavecun l’État,maispasforcémentcelledel’entrepriseetdesaction- délai de deux ans, le comité ayant joué la montre, pourrait naires.Paradoxes’ilenestd’uneloiquidonneunecertaine désormaisintervenirdemanièreplussystématiqueetpolluer libertéauconseiltotalementthéorique,c’estl’Étatquiaurale ledéroulementdel’opération. derniermot. DidierMartin:Ilyaunrisquedeblocage,ouimaisilexistait HubertPreschez:nepeut-onenvisagerqu’avecledispositif déjàetlaloiaencadrécette«consultation»dansledélaid’un desdroitsdevotedoubleetdessociétésàgrosactionnairesde mois.Ilestvraiqu’encasderecoursjudiciaire,lecomitépeut contrôle, il va y avoir à nouveau des pouvoirs confiés au saisir le tribunal et le tribunal acter que les informations conseil? communiquées au comité d’entreprise sont insuffisantes et reporterledélai,cequis’estpasséavecGDF-SUEZ.Ilya DidierMartin:ilfautunemajoritédes2/3,c’estvraiqu’ilpeut désormais tant d’éléments à fournir pour ouvrir une offre yavoirdescasdefigureoùdesAGdécidentdedonnerdes Opa, par exemple l’autorisation sur les secteurs sensibles, pouvoirs d’action au conseil... Rappelons-nous du cas Her- etc.,quejenesaispassicedispositifestunélémentfonda- mès,sociétéencommanditeoùilavaitétédécidéd’émettre mental de ralentissement. Dans l’affaire Club Med précisé- desbonsBreton. ment, l’avis est intervenu dans les temps, il était d’ailleurs négatifetn’apasempêchél’opération. Viviane deBeaufort: Merci de cette analyse Didier. Deux constats: loi Florange non-évènement, en revanche «inter- u Rôleduconseild’administration ventionnite»del’ÉTATquiestàquestionner,carlesinves- tisseurs étrangers peuvent mal percevoir cette posture des Le dernier point est celui de l’abandon de la neutralité du pouvoirspublics.Etuneremarqueouunregretsurlefaitqu’il conseild’administration:celui-ciestcenséneplusêtresou- n’yaitpasenFrancede«businessjudgementrule»àl’amé- misauprincipedeneutralitéetpeutdoncprendredesmesu- ricaine.NousauronsaccèsavecCarolinedelaMarnierreà RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 8 COLLOQUE quelquesélémentsprécissurlesrésolutionsétantintervenues del’AMFaconduitsurlatableuneoffrepubliqueenbonneet sur ces sujets. Hubert, ainsi vous avez vécu l’affaire GDF- dueformeà21eurosparaction. Suezoùeneffet,lecomitéd’entreprisealargementjouéla montre! Nous avons convenu d’évoquer les effets «Flo- L’application de la loi Florange a d’abord été la gestion du range»potentielssurl’OPAClubMED.Vousquiavezvécu seuildecaducitéde50%définisurunebasenondiluéealors cette première offre sous l’égide de la nouvelle loi, qu’en que l’on disposait de plusieurs instrument dilutifs, ce qui a pensez-vous? Une offre, rappelons-le qui a fait l’objet, à permis d’établir une pratique de place avec les services partirdel’offreinitialedeseptcontre-offres,dixmoisetdes deBertrandDurupt.L’autreaspectdelaloiFlorange,c’estle recours judiciaires, une couverture médiatique importante. rôleducomitéd’entreprise.Unequestionfondamentaleest Est-cequelanouvelleloiachangéladonne? celui de sa représentativité, puisque c’était le comité de l’entrepriseetnonuncomitédel’ensembledugroupe.Des Interventiond’HubertPreschez associationsdesalariésquinesesentaientpasreprésentées DirecteurdudépartementM&AFrancedelaSociétéGénérale ontcrééleurpropresiteetémisunemusiqueunpeudiffé- rente. Une autre question pourrait être la difficulté à faire Entantquepraticienethorriblefinancier,pardonparavance respecter le délai d’un mois préalable à l’ouverture pour la destermesoujargonquejesuisamenéàemployer.L’OPA consultation du CE.Nous l’avons obtenu dans le délai ClubMEDesteneffetunépisodeassezintéressantdel’his- imparti, mais je crains que ça ne soit pas toujours le cas en toire des OPA en France: trois initiateurs: Global Resort pratiquedansd’autresopérations (Bonomi) contre deux actionnaires existants (Axa Private EquityArdianaujourd’hui,Fosunavecl’équipedemanage- Enfin,quantàl’extensiondelapérioded’offreetdecontre- ment).Deuxaspectsintéressantssontàdistinguerdanscette offre:ilyaeuunesurenchère«automatique»,reconnuele OPA: 11novembreparl’AMF,avecunachatauprèsdedeuxfonds. Ce relèvement automatique de l’offre dans le cadre de –labataillejuridiquefaceauxactionnairesminoritaires; l’article231-39poseunproblèmedelibrejeudesoffresetun problèmed’égalitédesactionnaires–ilyaunexcellentarticle –la bataille boursière intense avec la série de contre-offres sur le sujet d’Antoine Gaudemet dans le Bulletin Bourse. évoquée. Secondsujet,lagestiondesoffresetcontre-offresreportde Ledéclenchementintervientenmai2013avecuneannonce clôture, procédure d’accélération, confrontation des offres de l’opération, recommandée par le CA à l’unanimité avec avecuncalendrierdonnéparl’AMFde12jourspuis10jours, des engagements de soutenir l’offre apportés par deux gros puis5jours,délaiunpeucompliquéàteniravecuninvestis- actionnaires:AirFranceetlaCDC,avecuneoffreauprixde seurchinois.Iln’yapaseul’utilisationdudispositifdeder- 17,50euros.Réactionfortedecertainsactionnairesminori- nièreoffre,contrairementàcequiapuêtrediffusécomme tairereprésentés,lapremièreestcelledeSIAMquiseverra information,carilaétéréaliséqu’enpratique,çaauraitpu déboutédesonintérêtàagirpuisquelestitresontétéachetés êtrefortcompliquéparl’AMF,carilyavaitunrisquedese aprèsl’annonceetl’ADAMdeColetteNeuville,avecenaoût retrouveravecdeuxoffresassezsimilairesetunedifficultéà 2013, deux recours auprès la Cour d’appel deParis sur la identifier l’offre mieux-disante. Les services de l’AMF ont conformitédélivréeparl’AMF.Undébatjuridiquetrèslong, sans doute eu l’occasion au travers de l’OPA Club Med car il a fallu 11mois pour que la Cour d’appel déboute les d’identifierqu’ilyadesélémentsàclarifiersurcesdispositifs. requérantsetconfirmel’avisdeconformitédel’AMF,avecun Poursynthétiser,ilestheureuxdeconstaterqu’àl’aunedes largedépassementdudélaid’usaged’environquatremois.Le récentes OPA, la réglementation tend à s’améliorer quand Sénataalorsréagiàbonescientenmodifiantl’article621du sont perçues des insuffisances, mais l’effet Florange CMFendécembre,enencadrantlaprocéduredansundélai m’inquiètesurtoutquantàlaperceptiondesétrangerssurle decinqmoismaximum. dispositif de pré-consultation du comité d’entreprise. Nous attendons de pouvoir juger de la réactivité nouvelle de la DidierMartin:C’estletypemêmedeloidontonnesaitsielle Courd’appel. seraefficace! Viviane deBeaufort: Merci Hubert de ce témoignage HubertPreschez:Ilfautespérerquecedélaimetuneutile concretetDidierdevosréactions...Ilestvraiquenotredroit pressionsurlaCourd’appel,cardansl’affaireduClubMed,le du travail est globalement perçu comme un trou noir! Ces délaideplaidoirieaététotalementdéraisonnableetdonné sujets pourraient faire l’objet d’un colloque d’une journée uneimagechaotiquedudroitboursierfrançaisetdelaplace maispourtenirletiming,jem’adresseàCarolinedelaMar- deParis. D’autant plus, que l’affaire faisant intervenir un nierre.VousavezcrééilyadixansmaintenantleGrandprix grandinvestisseurchinoisaététrèsmédiatisée,notamment del’AG15,àlacléunsuiviméticuleuxdesAGchaqueannée. desunesduFinancialTimes.Àlaclé,unemobilisationdes Ce qui nous permet pour ce colloque d’avoir des éléments représentantsdelaplacefinancièredeParisquiaeuuneffeta d’analyseconcretssurlesrésolutionsintervenuesen2014et posteriori,maispasaucoursdel’offre.Notonsqu’àlasuitede celles qui se préparent en 2015, puisque nous sommes à la l’achat par Global Resort (Bonomi) de titres au-dessus du veille de la période dite des AG.Comment les entreprises prix d’offre pour faire échouer l’offre, l’AMF a appliqué le ont-ellesréagiàlafacultédedérogeràlaloiFlorangefinale- 30juin 2014, pour la première fois au cours d’une offre, le mentprévueaprèspasmaldedébats?Quiddel’attitudeà dispositif«put-uporshut-up»,destinéàpréciserlesinten- l’égarddelarègledenon-passivitédumanagement?Ya-t-il tionsdesacteursetfavoriserlaclartédesopérations.Çaaété euparexempleuneréactivationdesbonsBreton,dispositif un peu laborieux, mais c’est à saluer: après que la Cour de délégation de pouvoirs du management qui avait eu un d’appeleutrendusonavisenavril,GlobalResortaachetéà francsuccèspuisaquasidisparudufaitd’unaccueiltrèsfrais plusieurs reprises une quantité de titres importante et à un prix plus élevé que l’offre avec des intentions peu claires. ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• Finalement,c’estseulementle30juinqueledispositifformel 15 http://www.capitalcom.fr/assemblees-generales/. RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 9 COLLOQUE des actionnaires (à peine 7% des entreprises du CAC 40 En 2015maintenant, à la lecture des projets de résolution l’utilisenten2014)? pour le CAC 40, il y a clairement un choix de restaurer la souverainetédesactionnaires.Quelquessociétés,dontBou- InterventiondeCarolinedelaMarnierre ygues,souhaitenttirerpartidecettepossibilitéenproposant FondatriceetdirigeantedeCapitalCom16 uneautorisationderachatd’actionsenpérioded’offrepubli- que;d’autress’inscriventenfrancheoppositionàlaloiFlo- Mercid’abordVivianedel’organisationdecettemanifesta- rangeenyfaisantexplicitementréférencedansletextedes tionfortimportantecardevéritablessujetsdefondsontété résolutions pour appuyer leur attachement au principe de abordés:lerôledespouvoirspublicsl’équilibredumarché, neutralité;lamajoritédessociétésduCAC40respectentles l’activisme ... Et plus globalement, c’est la répartition des injonctionsdesprincipauxproxyadvisorsenévitantlesauto- pouvoirsetl’intérêtsocialdel’entreprisequisontinterrogés. risations financières en période d’offre publique, sans faire directementréférenceàlapossibilitéquiestofferteparlaloi. Factuellement,l’étatdeslieuxquevousm’avezdemandéde faire,établitqu’en2014,22sociétésduCAC40(55%)dispo- Surlaquestionspécifiquedel’émissiondebonsBretonins- saientdéjàdedroitsdevotemultiplepourlesactionsinscrites taurésenmars2006,commeexemplededispositifpermettant aunominatifdepuisplusdedeuxans.Lessociétésayantleur au management d’agir lorsqu’une Opa est déclenchée, que siègesocialhorsdeFrancen’étantpasconcernéesparlaloi,il VivianedeBeaufortm’avaitégalementdemandédevérifier: reste14entreprises,soit35%,quisontdonccibléesparlaloi septgroupesduCAC40enproposaienten2006,seulement Florange et devront prendre position lors des AG de cette cinq en 2010 et trois en 2011. Autrement dit, initialement annéeenproposant–ounon–unerésolutionvisantàrétablir plébiscitéparlesentreprises,cedispositifestdésormaisperçu leprincipe«uneaction,unevoix».Ànoteraussiqueparmi commeportantatteinteaupouvoirdesactionnairesetBou- cessociétés,troisavaientadoptélesdroitsdevotedoublepar yguesestactuellementlaseulesociétéquienafaitlapropo- lepasséetontdécidédelessupprimeravecleconsentement sitionenAG.Ilestintéressantd’examinerlamanièredontles de leurs actionnaires en AG après l’avoir pratiqué: Air entreprises contrent les dispositifs réglementaires proposés Liquide,l’OréaletVinci. parlespouvoirspublics.Lesactionnairesnesontpluslesseuls décisionnaires, Didier Martin l’évoquait. Au travers de ces Il faut souligner le rôle des agences de conseils en vote discussions sur l’opportunité de tel ou tel dispositif, c’est la («proxyadvisors»)quiontmenéetmènentunecampagne questiondel’arbitrageentrelesintérêtsdesdifférentespar- contrelesdoublesdroitsdevote.Ainsi,l’AFG,ISSetProxin- ties prenantes de l’entreprise qui est au cœur du débat. vestmenacentdenepasvoterlareconductiondesadministra- VivianedeBeaufortl’évoquait:ledébat,c’estceluidesdiffé- teursoudesnouveauxmandatssil’entrepriseneproposepas rentsmodèlesdegouvernanceetleconceptmêmed’intérêt unerésolutionpourrevenirau«oneshare/onevote»etune social de l’entreprise. On assiste aujourd’hui à un certain coalition d’actionnaires menée par PhiTrust a déposé des activisme, des revendications de la part de la société civile résolutionsnon-agrééesparleConseilquandcelaétaitnéces- pourquelesactionnairesassumentleurrôleetleursrespon- saire.Ilsveulentempêcherl’applicationdecetteloiafinde sabilités au sein du système aux cotés des salariés dont le maintenir la souveraineté des actionnaires. De même, atta- poids au capital des entreprises est en augmentation. chésauprincipedeneutralitéduConseild’administration,ils D’ailleurs, la parole en assemblée générale se libère sur de attendent que les résolutions concernées – notamment nombreuxsujetsquidépassentlafinanceoulesmétiers.On d’autorisation de rachats d’actions ou d’augmentation de peuttendreàcroireàunmodèlepluscollectifoùlesintérêts capitalsansDPS–précisentexpressémentquel’autorisation s’alignent. nepeutêtreutiliséependantuneoffrepublique. Hubert Preschez: Je souhaite rebondir sur deux points: Sil’onregardelespratiquesauniveauduSBF120en2014, quantaupouvoirdel’État,surunesociétécotée,ilparaitfort huit entreprises ont soumis cette résolution à un vote des compliquépourl’Étatdeprendreunedécisionquilèsemas- actionnaires:septl’ontpasséeavecplusde99%devoix,un sivementlemarché;quantauxdélais,plusilssontlongs,plus tauxd’adhésionexceptionnel;seulAlstoml’arejetéeà52% ladémocratieactionnarialeestendanger,cardansuneoffre devotesfavorablescarl’ÉtatademandéàBouyguesdevoter publique vous commencez avec une base d’actionnaires et contredanslecontextequevousconnaissez.En2015,d’après plusl’opérations’étenddansletempsplusleshedgefundsse les avis de convocations publiés, 11 groupes du CAC 40 proposentunerésolution«oneshareonevote»àl’ordredu substituentauxactionnaires,avecàlacléunepréoccupation jour. Les motifs récurrents au dépôt de résolution sont les devalorisationàtrèscourtterme. suivants: réticences des agences de conseil en vote et des investisseursinstitutionnelsàl’égarddesdroitsdevotedou- DidierMartin:Lesdécisionsdel’Étatprocèdentd’arbitrages ble;maintiendel’égalitédetraitemententrelesactionnaires liés au maintien d’emplois, d’une filière, etc. qui ont leur détenant leurs titres au nominatif et ceux les détenant au légitimitéensoi,maisnesontpastoujoursoptimalesquantà porteur; protection de la démocratie actionnariale traduite l’intérêtdelasociété.Surlesdélais,soitonfixedanslaloiun parleprincipe«uneaction–unevoix». délaiimpératif,maisalorssiilyadépassementdudélai,c’est un déni de justice, donc des sanctions pénales contre les ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• magistrats, soit c’est un délai indicatif: cet objectif de cinq 16 Fondéeen2005parCarolinedeLaMarnierre,CAPITALCOMestune moisrisquedenepasêtrerespecté,carlachambredelacour agencedecommunicationindépendante,forcedepropositionenmatière d’appel qui est d’ailleurs aussi en charge du contrôle de deperformanceresponsable.Expertencommunicationfinancière,CAPI- TALCOM a publié – dès 2006 – le 1er Baromètre des Attentes des concurrencen’apaslesmoyensdestatuer:ilssontseulement ActionnairesIndividuelsàl’approchedelasaisondesAGetle1erBilan troisetstatuentenchambrecollégiale.Lesintérêtsenmatière desAssembléesGénéralespuis–en2014–l’ObservatoiredesAction- deconcurrenceetdemarchésfinancierssontconsidérableset naires d’Avenir. L’agence accompagne les sociétés qui le souhaitent lesmoyensinsuffisants. afindefidéliseretdedévelopperleuractionnariatindividueletsalarié. www.capitalcom.fr. RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 10 COLLOQUE ConclusiondeVivianedeBeaufort: d’un intérêt à la cotation boursière? La question pourrait paraîtredécaléeparrapportàl’actualitédesmarchés,alors Eneffet,ceconceptd’intérêtsocialsurlequeldescentainesde quecedébutd’année2015estmarquéparuneforteanima- pages ont été écrites au cours des années, est un concept tionsurlefrontdesintroductionsenbourse:enEurope,51 évolutif.Sionl’approcheàéchelleeuropéenne,lesconcep- opérationsontétérecenséesàfinmars2015(pourunmontant tionssontfortdiversesentrel’intérêtstratégiquedel’entre- d’environ16,3milliardsdedollars,àcompareravec49opéra- priseàlarhénane,quipermetdestechniquesdeluttecontre tionset17milliardsdedollarsunanplustôt);enFrance,une une OPA parfois extrêmes: a été évoquée l’affaire ABN douzaine d’introductions a été réalisée depuis janvier sur Amro, je pense également à l’affaire Gucci avec un ESOP Euronext et Alternext, notamment dans le secteur des bio- montédetoutespiècespourcontrerlamontéedanslecapital tech,medtech(dontnoussommesleschampionsd’Europe). deLVMH,puislechevalierblancPPRquimonteaucapital sansAGetdel’autre,laconceptionactionnarialedel’entre- Ceregaindefaveurestcompréhensible.Ils’expliqueparune prise.Lanotiond’intérêtsocialenFranceestunmixdesdeux conjoncture économique propice, des considérations etclairementnotreréglementationchercheàtrouverunéqui- macroéconomiquesfavorablesliéesenparticulierauresser- libreautourdecesoppositions.Onpourraconcluredesana- rementducréditbancaireàl’économieouàlafaiblessedes lysesetdesfaitsquesilaloiFlorangeauneportéesymbolique tauxd’intérêt,quiattirelesinvestisseursversdesperspectives forte,carellemodifiepotentiellementcertainséquilibresde de rendement, poussant à la valorisation des jeunes entre- gouvernanceentredirectionetactionnaires,cequiasuscité prises de croissance; mais aussi à une «conjoncture» juri- nombrededébatsinternesenFrance17,enpratiquelapossi- diqueplusfavorable,marquéeparcertainsassouplissements bilitéderenonceràcertainsdispositifsaétéetvaêtreutilisée réglementaires(p.ex.del’utilisationduschémaproportionné par des entreprises soucieuses de conserver une relation de prospectus, utilisé dans la plupart des introductions sereineavecleuractionnariat,d’autantquecelaaétésouli- dePMEsurEuronextParisen2014),etc. gné,lesproxyadvisorsontfortementréagi.LoiFlorange,non évènement? Le suivi des OPA déclenchées depuis octobre Au-delà de cette embellie conjoncturelle, la question n’en 2013,réaliséparnosétudiantspourleCEDE-ESSECsemble méritepasmoinsd’êtreposée.Ilsuffitpours’enconvaincre démontrerqu’iln’yaguèred’impact18.Peut-être,attention d’observerlesmouvementsstructurelslongsàl’entréeetàla cependantàl’effetd’annonceàl’égarddesinvestisseursinter- sortiedelabourse,quiserévèlenteuxpluspréoccupants.On nationauxquiconsidèrentnotredroitcommefortcompliqué observeeneffetunebaissetendanciellesignificativedesIPO (ont-ilstort?).Ilseraintéressantd’identifierdanslesmoisà danslemonde,ettoutspécialementdanslemondeOCDE: venir,sic’estlaloioulaloidumarchéquiprévaut... selonleschiffresdel’Organisation,alorsquel’oncomptaiten moyenne1170IPOsparandansl’OCDEentre1993et2000, ce nombre est tombé à 650 entre 2001-2012. De même, Table ronde 2 : Intérêt de la Bourse l’equitylevésurlesmarchéssouffred’unmêmemal,dontle montantpassede135mdsà70mds$enmoyenneannuelle pour une entreprise aujourd’hui ? pour les mêmes périodes. Chute qui s’accompagne d’une pertedepositiondominantedesentreprisesOCDE,dontla Animée par Alain Pietrancosta, professeur agrégé à Paris partpassede80%dumarchédanslesannées1990à40%en I-Sorbonne; membre du Haut comité juridique de la place 2012.Parunesorted’effetdeciseaux,onobservedel’autre financièredeParis. côtéunehaussesensibledessortiesdecote:depuis2002,2000 sociétésse«délistent»parandesmarchésauplanmondial. Interventiond’AlainPietrancosta Ce qui signifie que 40% des sociétés cotées en 2002 ne l’étaientplus10ansplustard.Làencore,lechocestlocalisé Permettez-moi de remercier les organisateurs de la confé- géographiquement et témoigne d’un basculement: entre rence de m’avoir proposé d’animer cette table ronde qui 2002 and 2011, 78% de ces delistings se sont opérés sur les réunittroiséminentspraticiensdesmarchés: marchésOCDE.ÀlaBoursedeParis,lenombredesociétés cotéesadiminuédeplusd’untiersdepuis1970passantdeplus –CarolineWeber,directricegénéraledeMiddlenext; de1.300(1970)àmoinsde800(700delistingsentre2000et –Yannick Petit, président directeur général d’Allegra 2012). Ces delistings prennent essentiellement place sur le Finance; marché réglementé, avec une hausse relative du poids des delistingsvolontaires(largemajoritédesopérations). –FrankMartinLaprade,avocatchezJeantetAssociés. Laquestionseposedoncdel’identificationdesfacteursexpli- Ilfallaiteneffetcettecombinaisondecompétences,entrepre- catifs du phénomène, si l’on veut pouvoir peser sur cette neuriale, financière et juridique, pour tenter de traiter du évolution.Cesfacteurssont,àl’évidence,multiples.Ilspeu- sujet qui nous est assigné: l’intérêt de la bourse pour une ventteniràl’évolutiondel’équilibredumarché,desstraté- entrepriseaujourd’hui?Jeremarquelepointd’interrogation giesentrepreneuriales,àladéfiancedesinvestisseursretail, placéenfind’intitulé,quidonneunetournureunpeuprovo- audéveloppementdessourcesalternativesdefinancement... catriceausujet.Faut-ilvraiments’interrogersurl’existence Maissetrouveaussisouventmisenaccusation,cequiinter- pellelejuristequejesuis,leremarquabledurcissementdes ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• contraintes réglementaires pesant sur les sociétés cotées en 17 Lirenotammentl’interviewdeCyrilDeniaudetSophieVermeille«Le bourse, qui s’est opéré depuis 15ans, notamment sous la projetderéformedurégimedesOPAenFrance:quelsenjeuxpournotre pousséedudroitfinanciereuropéen,expriméeàtraversles pays,quelsenjeuxpournosentreprisesetleursactionnaires?»inDoc- fameuxtextes«Abusdemarché»,«Prospectus»,«IFRS», trine,RTDFN°4-2013. «Transparence», «MIF» et demain «SRD». S’il est dicté 18 UnsuividesOPAdéclenchéesdepuis2013réaliséaveclesétudiantsde par des considérations bien compréhensibles de transpa- l’ESSECdanslecadredestravauxduCEDE(distribuéauxparticipantsdu rence,d’équitéetd’intégritédesmarchés,onconçoitquece Colloque)estàdispositionsurdemande:www.Cede-essec.fretàl’adresse: http://document.transactive.fr/rtdf/Suivi_des_OPA_en_France_2014-2015.xlsx durcissement puisse constituer aux yeux des émetteurs – et RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 11 COLLOQUE notammentdesentreprisesdetaillemoyenne–unhandicap marché et utiliser également ses titres comme moyen de compétitif, comparé aux voies alternatives de financement financementnotammentlorsd’acquisitions.Ensuite,etc’est (privateequityou,demain,crowdfunding). important,elleaccroîtlavisibilitéetlanotoriétédel’entre- prise.Aujourd’hui,s’introduireenBourse,c’estentrerdansle D’où,aucoursdeladernièrepériode,uneprisedeconscience clubferméde1000sociétés.C’estunatoutconsidérablepour collective, compte tenu du rôle unique joué par la bourse lesPME-ETIquisontsouventconfrontéesàdesgroupesde notammententermesdefinancementenfondspropres,quia dimension internationale sur leur marché. La Bourse ren- débouchésurdeseffortsréalisésouenvoiederéalisation,au forcelacrédibilitédel’entrepriselaquellepeutavoiraccèsà niveaueuropéenetnational,danslesensd’uneréévaluation descréditsdansdemeilleuresconditions.Ensuite,mêmesi decescontraintes,afinderevigorerl’attractivitédumarché c’estunpeucaricatural,ilyauneffetloupe:seulslesleaders boursier,notammentpourlesentreprisesmoyennes.Citons sontenBourse.C’estaussiunmoyenefficacedemotiverles ducôtédel’AMF,l’assouplissementdesrèglesrelativesaux salariésàtraversdesplansdestock-optionsoud’attribution introductions en bourse; et du côté d’Euronext, la mise en d’actionsgratuites.Enfin,laBoursefacilitelerecrutementet œuvre d’EnterNext, qui a facilité en 2014 l’entrée sur les permetderecevoirspontanémentdemeilleursCVquedans marchés français d’Euronext de 27 nouvelles sociétés; la lessociétésnoncotées(imageemployeuretvisibilité). révisiondesrèglessurlacotationdesplacementsprivésobli- gataires; et demain peut-être, la facilitation des sorties de u Lesavantagespourlesactionnairesetlesentrepreneurs cotepourlessociétésdontlemarchédestitresserévèletrop illiquide,cequipeutconstituerparadoxalementunargument LaBourseoffreauxentrepreneursetauxautresactionnaires àl’entréeenbourse. un moyen de liquéfier leur participation. Cela permet aux actionnairesfinanciersdesortirdansdebonnesconditionset Au niveau législatif européen, une tendance se dessine à auxentrepreneursderéaliserunepartiedeleurpatrimoine l’allégement de contraintes réglementaires pesant sur les sansperdrelecontrôledelasociété.LaBourseassurel’indé- PMEcotées,nettementperceptibledanslesnouveauxtextes pendancedesentrepreneursfondateurs:ilestdeloinpréfé- Prospectus,Abusdemarché,TransparenceetMIF.Mouve- rabled’avoirplusieursmilliersd’actionnairesqu’unseulqui ment appelé, espérons-le, à se poursuivre dans le cadre du pèsesurvotrestratégie.Lacotationdestitresimposelalibre programme dit CMU(Capital Markets Union), destiné à circulation des titres et l’égalité de traitement des action- remédier à la sur-dépendance au crédit bancaire des entre- naires,doncledirigeantabienplusd’autonomiequelorsqu’il priseseuropéennesetausous-dimensionnementdesmarchés a quelques actionnaires référents dans le cadre d’un place- financiers européens. De fait, alors que l’économie euro- ment privé, les investisseurs vont intervenir dans de nom- péenneestlégèrementplusimportantequel’économieamé- breux cas de figure avec notre droit très protecteur, faire ricaine,lemarchédel’equityestdeuxfoisplusimportantaux parfoisdespactesentreeuxetvousdictervotrestratégie.La États-Unis. De même que si l’Union européenne possède Boursepermetenfinunevalorisationdelasociétéaucoursdu davantage de sociétés cotées que les États-Unis, celles-ci temps; votre banquier voit le patrimoine en temps réel de possèdentunecapitalisationdeuxfoisinférieure. l’entreprise et vous considère. Enfin, la bourse offre une valeurinstantanéedestitresdel’entrepreneur,lequelpeutà Le décor planté, il convient maintenant de faire place aux toutmomentvendredesactionssurlemarchéetainsidiver- acteurs,quivontnouslivrerleursentimentsurcetteévolu- sifier son patrimoine. Les titres peuvent également faire tion:faut-ilêtreinquietdecestendancesetdansl’affirmative, l’objetdenantissementpourl’octroid’uncréditpersonnel.Il queconviendrait-ildefairepourlesenrayer?Commençons estenfin,etçan’estpasnégligeable,plusfaciledecéderses enbonnelogiqueparl’entréeenbourseavantd’évoquerla titres que des actifs, la transmission à vos descendants s’en sortie.Quelestencorel’intérêtdelaboursepourdesentre- trouve facilitée. Mon message est donc positif. Il existe des prises? contraintescertes,maissurtouténormémentd’avantages.Et maintenant,jevaislaisserCarolineWebervousexpliquerle InterventiondeYannickPetit contraire... PrésidentDirecteurGénérald’AllegraFinance InterventiondeCarolineWeber Notre activité est l’accompagnement d’ETI à l’introduction DirectriceGénéraledeMiddlenext enbourse.Onconstateunflotd’introductionscestemps-ci,ce qui démontre qu’il y a aujourd’hui plus d’intérêt à être en Jesouscristotalementaveccequevientdedirenotreinterve- Boursequ’ànepasyêtre.Cesproposneconcernentpasles nant précédent et cela souligne d’autant un énorme gâchis. entreprises du CAC, mais visent bien les PME-ETI et cet Énormément de belles entreprises devraient entrer en intérêtpeutêtreanalyséendeuxtemps: Bourse, mais y renoncent, au moins 500. Je n’évoque pas évidemmentdessegmentsspécifiquesBiotech,etc.Maisde u Lesavantagesoffertsàl’entreprise belles entreprises familiales n’y viennent pas. Pour quelles raisons?Ellesn’yviennentpasàcausedelarégulationexces- Ils’agittoutd’aborddepouvoirleverdesfonds,dansd’excel- sive: on a déstructuré les marchés, le système est fou! lentesconditions:laBourseoffrelemeilleurprix.Silacas- Aujourd’hui,unprospectusfaitenmoyenne300pages,c’est cadedesfinancementsdesentreprisesestrespectée,lavalori- lu par personne. Une PME qui entre en bourse, c’est 574 sation offerte par la Bourse est certainement la plus élevée instructions ou recommandations de l’AMF, c’est illisible que peut obtenir l’entrepreneur en quête de financements, pour une PME! Conséquence: les dirigeants des PME ne sauf à céder son entreprise mais ceci est un autre sujet. La lisentmêmepluslesrecommandationsdel’AMF,carilsn’ont Bourseoffreégalementlapossibilitédemobiliserdesmon- nilesmoyensniletempsdes’yconsacrer.Ensuite,ilyales tants,entermesdevolumes,beaucoupplusimportantsqu’en IFRS: les entreprises ont été obligées d’adopter les IFRS placementprivé(privateequity).Onadoncàlafoislevolume pourparleràl’AMFetauxanalystesetauxinvestisseurs,mais etleprix.Unefoislasociétécotée,celle-cipeutrecouriraux devantlacomplexitéetl’illisibilitédecesnormes,lesentre- marchésdèsqu’elleenabesoin:battremonnaie,revenirau prises mettent en place un deuxième jeu de normes en RTDFN°1/2-2015 u COLLOQUE 12
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