•-jÔICTIONNAIRE FAMILLES FRANÇAISES } ^-ANCIENNES OU NOTABLES y la fin du siècle y~Y A XIXe O.'to'É.-A.. '• >> u TOME UIX-HUITIËMB FÉL-FOB ÉVREUX (MPklMERIE HERISSEE CHARLES E t – v PAUL HLRiSSEY .pU.CC' s* k "<*y î,a 4, ruk dî B^^Q^;E4 ^< DICTIONNAIRE DES FRANÇAISES FAMILLE S ANCIENNES OU NOTABLES la fin du XIXe siècle A '. IL A ÉTÉ TIRÉ DJ3 CET OUVRAGE " 200 ûœçm'plaipegseulement, non mis dans le commerce* ' 'V jvc =ini DICTIONNAIRE ; .. . DES .- FRANÇAISES FAMILLES CIENNES (I NOTABLES OU /o/ j> la fin siècle du XIX' A PAR d'E.-A. C. DIX-HUITIÈME TOME FEL-FOR ~r ÉVREUX IMPRIMERIE CHARLES HÉRISSEY PAUL HÉRISSEÏ SUCC' 4, KHE DE LA BANQUE. 4 1922 ?. JEAN-THÉOPHILE-GUSTAVE CHAIX D'EST-ANGE 1863-1923. L'auteurde ce XVIIIe volume n'aura pas eu son plaisir accoutumé de le distribuer lui-mêmeà amis, lecteurs fraternels associés ses aux à son labeur dans des recherches communes, auxquels il apportait, enquête de premier ordre, mine aussi précieuse qu'iné- par une une puisable d'informations.La mort l'a surpris brutalement milieu de au son œuvre, dans sa pleinematurité, si toutefoisla mortpeut surprendre le chrétien et le sage, car G. Chaix d'Est-Ange était de ceux que leurs hautes vertus tiennent toujours en règle avec leur conscienceet leur foi. Ravi en quelques minutes à l'affection des siens et à la science, alors qu'il venait lui-mêmed'accompagner un ami à sa der- nière demeure, il présenter devant le grand Juge l'es- a pu se avec pérance permise hommes de bonne volonté, c'est-à-dire aux aux cœurs purs qui auront ici-bas soumis leur vie aux enseignements de la parole divine et à la pratiquedes devoirs. Si l'orgueil est le vice qui trouve le moins grâce devant le tribunal suprême, la modestie sans doute est la vertu la plus agréable à Dieu, la plus propre à nous assurer son contentement et sa miséricorde. •Or, peu d'âmes ont été plus modestes que celle de G. Chaix d'Est- Ange. On peut direqu'il voulu vivre dans constantoublide soi, de a un sa valeur, des services qu'il rendait à l'érudition, point au que ses lecteurs les plusassidusignorent peut-êtrela d'unauteurqui, personne prenantr/iKtto/tDn à la lettre, entendait resterignoré Amanesciri et pro nihilo reputari Il semblequ'il eût pris à tache, le déguisant en 1. Imitation, lib. I. cap. 2. toute de simples initiales, de soustraire publicité dont sous un nom il eût pu tirer une fierté légitime, tant par l'illustrafon de son grand- père que par l'honneur que son propre mérite y ajoutait. Mais son second volume était à peine paru que, déjà, L Intermédiaire des Cher- cheurs et Curieux signalait l'importance et l'étendue de cette « exceptionnelleentreprise et perçaitl'anonymat de l'auleur Quel « », « « monument sera l'ouvrage de M. C. d'E.-A., pourquoi ne pas nommer M. Chaix d'Est-Ange ? lorsqu'il sera achevé L'heure « » vient toujours qui lève les voiles. Aujourd'hui ce serait manquer à la reconnaissance des lettrés, des chercheurs qui ont tant usé et useront tant encore de son œuvre, de tous ceux qui en déplorent le fatal ina- chèvement, et ce serait trahir leur unanime gratitude que de laisser tomber sur sa mémoire le silence dans lequel il s'était enfermé. G. Chaix d'Est-Ange a dit dans son tome IX les origines de sa famille, brièveté qui demande quelques développements. avec une Issue d'une vieille souche provençale qui donna de nombreux officiers à la sénéchaussée de Sisteron et à la Chambre des Comptesde la pro- vince, elle prend pied dans l'histoire à la fin du xvm° siècle avec Richard-François, né à Apt, d'abord avocat parlement d'Aix, puis au à Caen no, quand éclata la Révolution,il occupait une situation assez voir élire président de l'Assemblée fédérale des dépar- en vue pour se tements de l'Ouest, dans leur insurrection contre la sanglante tyran- nie de la Terreur. Cœur généreux, boucheéloquente, il parvint à tirer des cachots de Coutances 400 victimes vouées à la mort. Il n'en fal- lait tant alors être accusé de fédéralisme, et traîné devant pas pour le Tribunal révolutionnaire Incarcéré à la Conciergerie, il ne dut son salut qu'à dramatique subterfuge raconté, 1820, à funé- un en ses railles, par M* Louis Caille, son confrère à la Cour Royale de Paris. Nommé, sous le Consulat, Commissaire du Gouvernement dans la Marne, puis Procureur Général près la Courde Reims, la nouvelle organisationjudiciaire de 1814 le rendit à la vie privée. Il fit alors se inscrire au barreau de Paris, à un âge où le talent n'a plus le temps d'imposer place notoriétés de la capitale, mais toutefois sa aux avec d'éclat recevoir du général Grouchy la délicate mission assez pour de le défendre dans le procès des proscritsde 1815. Il mourut pauvre, et son nom sans doute eût été emporté par l'oubli qui ensevelitsi vite les orateurs, s'il n'eût laissé héritage plus durable la fortune un que un fils de vingt ans, déjà inscrit au barreau, déjà fixant sur lui les « regards des magistrats et du public et qui devait bientôt ériger « » génie l'éloquence paternelle. en Rousse, d'une plume aussi oratoire qu'académique, dit la M" a vie de Gustave Chaix d'Est-Ange dans une préface magistrale en tête de ses principauxdiscours et ce n'était pas trop d'un tel maître de la parole pour peindre celle du maître incontesté parmi les fastes du Palais. H fut, Berryer, la plus grande voix judiciaire du avec xix" siècle même vigueur, même accent, même don de pénétrer jusqu'aux moelles mais aussi plus de pureté, plus d'élégancechâtiée, avec ce secret, si rare aux improvisations brûlantes, de trouver d'em- blée la forme impeccable d'une page à loisir ciselée par l'art d'un styliste consommé. On ne peut lire, encore aujourd'hui, les plaidoyers de Chaix d'Est- Ange sans une sorte d'émotion contagieuse, sans se laisser gagner au nombre, à l'harmonie, à la beauté du verbe et à la force des sen- timents. Et cependant, où sont le geste, le trait, le souffle, la vie enfin par quoi s'animait cette voix maintenant écrite et muette ? M. Rousse a raison de dire que l'éloquence est à la fois le plus puis- sant et le plus fragile des arts. Ceux-là mêmes qui l'ont portée à son comble ravissent en mourant la moitié d'eux-mêmes à la postérité. Ils n'offrent plus désormais qu'un intérêt rétrospectif où l'actualité les supplante, où l'horreur, le scandale, sinon la simple curiosité, allèchent les esprits. Parfois, c'est les trahir de les livrer que au lecteur, car combien peu ont reçu l'exceptionnel privilège de passer de l'oreille aux yeux, dans une égale perfection de la plume et de la parole? On ne lit plus Berryer on ne lit plus Chaix d'Est-Ange. Ce sont de grands noms commis au souvenir par la gloire. Mais on ne songe point à goûter personnellement dans leurs écrits une admira- tion qui n'a plus d'échos. 1. Éloge funèbre, de M" Louis Caille. Et tel est le revers des orateurs qui ont le plus remué les auditoires, qui ont fait tressaillir les foules, de demeurer sans contact avec la postérité. Aussi peut-on dire, dans ce sens, que le petit-fils de Chaix d'Est-Ange, sans avoir jamais connu ni vouluconnaître la renommée, repoussant même la plus légitime notoriété, mais laissant en en une journellement consultée indispensable instrument œuvre comme un dans la solitude des bibliothèques et des cabinets, a fait autant pour le qu'il portait les retentissantssuccès de glorieux aïeul nom que son à la barre. Il ne l'apas seulement soutenu dans une vie de labeur et de dignité, il l'a perpétué delà de la mémoire des hommes, tant au qu'il des érudits des chercheurs lui guidés dans y aura sagaces, par les sous-sols du passé. C'est à un âge où la jeunesse sort à- peine de l'adolescence que Chaixd'Est-Ange commençade plaider.On sait quelleépoque troublée traversait alors la France lendemain de la Restauration. D'un au côté, les échappés de la guillotine rentrant d'un douloureux exil, gros de représailles et de ressentiments; de l'autre, une opposition disparate où les hainesjacobines coudoyaientles regrets d'une armée licenciée, dépouillée par la paix du prestige de ses victoires et de ses exploits. Delà d'incessants complots, politiques et militaires, traduits devant les tribunaux. C'est l'un d'eux qui mit, à 21 ans, Chaix d'Est- Ange en lumière, par une plaidoirie si remarquée à la Cour des Pairs le Grand Référendaire Sémonville le vivement d'en- que pressa trer dans la magistrature en se chargeant de son avancement. Mais le jeune homme était trop indépendantde caractère lier pour sa liberté. Il y avait déjà en lui l'avocat qui devait s'écrier un jour Les forts et les faibles ont des droits égaux à appui; voix « mon ma appartient à tous etje n'appartiensà personne. Il avait d'ailleurs « » pris rangdans le parti libéral, avec une popularitébientôt assez grandie pour que, en 1830, la ville de Reims, fidèle à la mémoirede son père, l'élût député. Il entra donc dans la politique dont nature généreuse sa ne tarda pas éprouver l'écœurement, car il n'entendait point asservir ses votes à des mots d'ordre parlementaires ou à d'obscures combi- naisons de couloirs; et, bien qu'il ait gardé seize ans son mandat, bien qu'il ait occupé souvent la tribune, ce n'est pas là qu'il faut chercher son éloquence, mais à son banc d'avocat. Il plaida en effet les causes les plus célèbres, avec une conception si haute de sa dignité professionnellequ'il n'acceptajamais que celles où il avait la convictiondu bon droit. Trois fois bâtonnier de l'Ordre contrairement aux traditions du Palais il dut à ses fonctions de défendre Fieschi. Ah que cela estloin de nous Mais quels exemples et quelles leçons à ceux qui voudraient s'instruire à notre passé judi- ciaire Quel soulagement pour notre esprit si, au sortir de ce même prétoire où le meurtre aujourd'hui s'érige en vertu, où l'anarchie tonitrue et fait, des assassins de tout sexe, autantde Judiths et d'Aris- togitons, relisions le plaidoyer de Chaix d'Est-Ange faveur nous en de cet halluciné, instrument des Sociétés secrètes, qui avait, dans sa vie, certains actes contraires à son horrible forfait Fieschi est un grand criminel. Mais, si vous avez le droit de lui « parler de son crime, et même de son supplice, j'ai au moins le « droit à mon tour de lui rappeler les actions généreuses de sa vie, « d'apporter cette consolation à malheur, et de préparer cette son « justice à sa triste mémoire. S'il doit mourir, qu'il ne marche pas « à la mort escorté seulement de malédictionset d'outrages,et déses- « pérant de la bonté de Dieu comme il a une fois désespéré de la « pitié des hommes. « » Cette élévation de l'âme et du langage, cette conscience de la dignité humaine jusque dans la victime réclamée par l'échafaud, fut la loi de éloquence et celui qui avait proclamé si haut les droits son de la défense, exigea pareillement le respect jusqu'au scrupule en dans l'accusation, quand il de la barre parquetdeProcureur passa au Général près la Cour de Paris, où l'Empire l'avait appelé 18S7. en Tel fut le thème ordinaire de ses discours de rentrée, de ses mercu- riales disait autrefois, recommander juges la mise comme on pour aux garde contre eux-mêmes,la bienveillanceet la compassion en Dlus le crime est atroce, plus le péril est grand le magistrat. pour « Ce n'est pas seulement contre indignation qu'il doit être sa propre « garde, c'est contre le cri de la consciencepublique qui, en encore « «-tout émue, juge sans savoir, condamnesans entendre, et voudrait « renverser toutes les barrièresque la prudence oppose à ses aveugles colères. « Dans cette lutte qui s'engageentre le juge et l'accusé, « le magistratn'a jamaistrop de fermeté contre les artifices.Maisaussi « sa patience doit être à toute épreuve, sa modérationéclatante il ne « faut pas qu'il abuse de sa parole trop facile, de sa position si pleine d'autorité, au risque d'augmenter le trouble et les embarras d'un « l'audience. « malheureux qu'intimide déjà le seul aspect de Tout « doit être grave dans ce graveministère, et la raillerie ne doitjamais y trouver place. C'est toujours triste spectacle celui d'un un que « « malheureux qui défend, d'un coupable qui perd. La société se se a « le droit de le condamner; elle n'a pas le droit de l'insulter tout « bon mot contre lui ne serait qu'une méchante action; et il me « semble qu'ici j'ai bien le droit de rappeler magistrats cette aux « parole que Bossuet ne craignait pas d'adresser aux rois et aux « princes de la terre Ne vous fiez pas à votre puissance, et qu'elle « « ne vous emporte jamais à des railleries insultantes, car il n'y a rien de plus odieux. » Cela se disait sous l'Empire. La démocratie, depuis, a-t-ells mieux parlé? Chaix d'Est-Ange, finir carrière, avait accepté siège pour sa un au Sénat. Mais cet enfant gâté de la vie », l'appelait M. Rousse, comme « n'échappa point douleurs des deuils domestiques.Il perdit aux succes- sivement sa femme et sa fille, celle-ci mariée à M- Gressier, d'une vieille famille picarde, ministre de l'Agriculture, et arrachée en pleine jeunesse, en quelques heures, des bras de son époux désespéré, sans que son malheureux père eût eu le temps d'accourir pour un dernier embrassement. Elle était deux fois sienne par la chair et l'intelligence, esprit des plus fins, des plus originaux qu'on pût connaître. Un c grand écrivain lui envoyait de livres cette dédicace un ses avec « au grand juge. On ne se lassait point de l'entendre, et il était « « difficile, même aux plus forts, de lui donner la réplique » Il lui restait plus qu'un fils qu'une mort moins fou- ne non droyante devait un jour emporter comme sa sœur, comme son propre 1. Univers Illustré, 25 septembre 1862.
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