1 Chapitre premier Le téléphone me réveilla au milieu de la nuit, Nous étions en pleine vague magique, il n'aurait pas dû fonctionner mais il sonnait, encore et encore, furieux que je l'ignore, jusqu'à ce que je me penche pour décrocher. _Mmoui ? _Debout, kate ! La voix cultivée et onctueuse suggèrerait un homme mince élégant, séduisant, tout ce que Jim n'était pas, En tout cas pas sous sa forme humaine. Je me forçai à ouvrir les yeux suffisamment longtemps pour jeter un coup d'œil à l'horloge mécanique de l'autre côté de la pièce. _Il est 2 heures du matin, Certains d 'entre nous dorment la nuit, _J'ai un contrat, dit Jim Je m'assis dans le lit, tout un coup bien éveillée. Un contrat était une bonne chose – j'avais besoin d'argent. _Moitié-moitié ? La voix de Jim se durcit. _Trente-cinq pour cent. _Cinquante Mon ancien partenaire de la Guilde réfléchit longuement. _D'accord, quarante. 2 Je raccrochai. La chambre était calme. Mes rideaux etaient ouverts, la lumière de la lune s'insinuait dans la pièce à travers les barreaux qui protégeaient la fenêtre. La lune agissait comme un catalyseur, le métal scintillait d'une platine bleutée aux endroits ou l'argent de l'alliage se mêlait aux sorts de garde. Au- delà, Atlanta dormait comme quelque animal balourd et légendaire, sombre et paisible trompeur. Quand la vague magique refluerait, inévitablement, l'animal se réveillerait dans une explosion de lumières électriques et d'éventuels coups de feu. Mes gardes ne stopperaient pas une balle, mais elles protégeaient ma chambre des dangers magiques et cela me suffisait. Le téléphone carillonna. Je laissai tinter deux sonneries avant de décrocher. _D'accord, dit la voix de Jim avec un soupçon de feulement, cinquante. _Ou es-tu ? _Dans le parking sous ta fenêtre. Il appelait d'une cabine téléphonique qui n'aurait pas dû fonctionner non plus. J'attrapai mes vêtements, posés à côté du lit justement pour ce genre d'occasions. _Quel est le contrat? _Un taré pyromane. Quarante minutes plus tard, je me frayais un chemin dans un parking souterrain en insultant Jim sotto voce. Les lampes étaient hors service pour cause de magie, je ne voyais pas ma main devant mon nez. 3 Une boule de feu s'ouvrit comme une fleur dans les profondeurs sombres du garage. Immense, tourbillonnante de rouge et de jaune, elle rugissait vers moi. Je sautai derrière un pilier de béton, mon couteau de lancer était trempé de sueur. La chaleur m'enveloppa. Un instant, je ne pus pas respirer puis les flammes me dépassèrent pour exploser en étincelles contre le mur. Un ricanement malicieux éclata des tréfonds du parking. Je jetai un coup d'œil prudent dans sa direction. Rien que les ténèbres. Où était la vague tech quand on en avait besoin ? En face de moi, dans la rangée de piliers suivantes, Jim leva la main et joignit ses doigts et son pouce plusieurs fois, imitant un bec qui s'ouvre et se ferme. Il voulait que je négocie avec un fou qui avait déjà transformé quatre personnes viande fumante. OK. Çà, je pouvais le faire. _D'accord, Jeremy ! ( Je hurlai dans dans la nuit) Donne-moi la salamandre et je ne te coupe pas la tête. Jim mit sa main devant son visage et tremblota. Il me semblait qu'il riait mais je n'en était pas sûre. Contrairement à lui, je n'avais pas la chance d'être nyctalope. Le ricanement de Jeremy devint hystérique. _Chienne stupide ! Jim se détache du pilier et se fondit dans les ténèbres, filant la voix de Jeremy. Sa vue était meilleure que la mienne dans l'obscurité mais même lui ne voyait pas grand chose dans le noir complet. Il devait chasser au son, ce qui signifiait qu'il me fallait continuer à faire parler Jeremy. Pendant que Jim traquerait sa voix mélodieuse, Jeremy me traquerait moi. 4 Aucune raison de m'inquiéter, il s'agissait juste d'un meurtrier pyromane armé d'une salamandre dans un globe de feu de verre enchanté, et qui avait l'intention de foutre le feu à ce qui restait d'Atlanta. Le plus important était de protéger le globe. Si ce truc se brisait, je deviendrais plus célèbre que la vache de Mrs O'leary. _Putain! Jeremy, tu manques de vocabulaire. Il y a tant de manières de me décrire et tout ce que tu trouves c'est « chienne »? Donne moi la salamandre avant de te blesser. _Va te faire foutre, pute ! Une minuscule étincelle apparut sur ma gauche. Elle était suspendue dans les airs, illuminant la bouche écailleuse de la salamandre et les mains de Jeremy serrant la sphère avec avidité s'ouvrit et cracha l'étincelle. L'air entra en contact avec le minuscule concentré d'énergie et le transforma en boule de feu dans une explosion de lumière. Je me jetai derrière le pilier juste au moment où le feu s'écrasait sur le béton. Les flammes couraient de chaque coté de moi. La puanteur âcre du soufre me picota les narines. _Cette boule de feu m'a ratée d'un kilomètre. Tu tires à blanc aussi avec ton autre salamandre, Jeremy ? _Crève, salope! Jim devait être assez proche maintenant. Je me mis à découvert. _Allez! Viens, espèce de dégénéré pleurnicheur! Tu foires toujours tout ? Je vis les flammes, plongeai sur le côté, percutai le sol et roulai pour me mettre a l'abri. Au dessus de moi, le feu rugissait comme un animal enragé. Le manche de mon couteau brûla 5 mes doigts. L'air dans mes poumons se transforma en feu et mes yeux se mirent a pleurer. Je pressai mon visage sur le sol en béton poussiéreux, priant pour que la chaleur n'augmente pas, puis, soudainement, ce fut terminé. Putain de merde! Je sautai sur mes pieds et chargeai Jeremy. La salamandre flamboyait dans sa boule. J'entraperçus le sourire tordu du pyromane. Il faiblit lorsque les mains sombres de Jim se refermèrent autour de sa gorge. Jeremy s'effondra, aussi mou qu'une poupée de chiffon, le globe roula hors de ses mains affaiblies. Je plongeai sur lui, l'attrapai à une dizaine de centimètres du béton et me retrouvai face à la salamandre. Des yeux rouge rubis me regardèrent, pleins de curiosité, des lèvres noires s'ouvirent et un long filament de langue, aussi fin qu'une toile d'araignée, rampa hors de la bouche pour embrasser le verre sur le reflet de mon nez. Salut! Moi aussi, je t'aime. Doucement, je me mis à genoux et me redressai. La présence de salamandre tirait de mon esprit, aussi avide de plaire qu'un chaton enthousiaste quémandant une caresse. Des visions de flammes et de chaleur ondulaient devant moi. Allez! Viens on brûle un truc ...Je fermai violemment mes volets mentaux, l'emprisonnant hors de mon esprit. Non vraiment j'ai pas envie. Jim relâcha sa pression sur la gorge de Jeremy, le pyromane s'effondra comme une couverture mouillée. Le blanc de ses yeux fixé sur le plafond, figé par la mort dans un instant de surprise totale. On n'aurait pas besoin de vérifier son pouls. Merde. On venait de perdre le bonus de capture. _Tu m'avais pas dit que c'était mieux de le prendre vivant, mumurai-je. 6 Jeremy vivant valait beaucoup plus que son cadavre. Nous serions tout de même payés, mais nous venions de perdre un tiers de l'argent. _C'était le cas. Jim retourna le corps sur le côté, me montrant son dos. Un mince carreau de métal terminé par trois plumes noires dépassait d'entre les omoplates du cadavre. Avant que mon esprit ait le temps de digérer l'information, je me jetai par terre, protégeant la salamandre. Jim fut au sol avant moi. Nous fixions nos yeux sur l'obscurité. L'obscurité et le silence. Quelqu'un avait abattu notre contrat avec un carreau d'arbalète. Il aurait pu nous avoir aussi. Nous nous étions tenus près du corps au moins quatre secondes. Plus le temps nécessaire pour lâcher deux autres traits. Je touchai Jim puis mon nez. Il secoua la tête. Avec tout ce soufre dans l'air il aurait probablement été incapable de sentir un sconse. Je restai immobile, essayant de respirer doucement. Nous pouvions qu'écouter. Une minute s'écoula lentement, longue, vicieuse, silencieuse. Très lentement, Jim s'accroupit et désigna sa gauche. J'avais la vague impression qu'il y avait une porte sur la droite mais , dans le noir, avec un arbalétrier inconnu à l'affût, j'avais plus confiance dans les sens de Jim que dans les miens. Jim attrapa le cadavre de Jeremy, le jeta en travers des ses épaules et nous nous élançâmes, penchés bas, courant vite, lui devant moi, à moitié aveugles dans l'obscurité. Les piliers de béton se succédaient, un, deux, trois, quatre. La tech frappa et, avant que je puisse reposer mon pied levé, la magie s'eloigna du monde, laissant les restes de la technologie derrière elle. Les néons au plafond tressautèrent et revinrent à la vie dans un 7 bourdonnement, inondant le parking d'un lueur profane. Le rectangle sombre de la sortie n'était qu'à quelques mètres de nous. Jim y plongea tandis que je me jetais sur la gauche, derrière le pilier le plus proche. La salamandre dans son globe cessa de flamboyer et s'endormit, ressemblant désormais à un inoffensif lézard noir. Mon arme longue portée était hors service. Je déposai le globe sur le sol et fis glisser Slayze hors de son fourreau. Les salamandres sont surfaites de toute manière. _Il est parti, dit Jim depuis le seuil, pointant le doigt derrière moi. Je me retournai. Loin au fond du parking, le mur de béton s'était effondré, révélant un passage étroit qui menait probablement à la rue. Il avait raison. Si l'arbalétrier avait vouliu nous avoir, il aurait disposé de tout le temps du monde pour le faire. _Alors il a juste abattu notre cible avant de se tirer? _Ça y ressemble. _Je ne comprends pas. Jim secoua la tête. _Il se passe toujours des choses bizarres dans tes parages. _C'était ton contrat, pas le mien. Une douche d'étincelle tomba du haut de la porte et un signe vert « SORTIR » apparut. Jim le regarda un instant, ses traits tordus dans une expression très nettement féline, dégoût et fatalisme mêlés, et secoua de nouveau la tête. 8 _Preums pour le carreau! Appelai-je _OK. Le bipeur de Jim bourdonna. Il vérifia et une expression familière apparut sur son visage. _Oh non! C'est hors de question! Je ne peux pas le porter tout seul! _Les affaires de la Meute. Jim se dirigea vers la sortie. _Jim ! Je résistai à l'envie de lancer quelque chose sur le seul vide. Voilà ce qui arrive quand on bosse avec un mec qui fait partie du conseil de la Meute. Ce n'était pas que Jim était un mauvais ami. C'était juste que pour les Changeformes, la Meute passait avant tout. Sur une échelle de un a dix, elle obtenait onze et le reste ne valait que un. Je regardai le cadavre de Jeremy qui s'étalait comme un sac de pomme de terre sur le sol. Probablement soixante-quinze kilos, poids mort. Je ne voyais pas comment je pouvais le porter en même temps que la salamandre. Et il était hors de question de laisser la salamandre sans surveillance. La magie pouvait frapper a tout moment et réveiller le petit lézard. En plus, le sniper était peut-être toujours dans le coin. Il fallait que je me tire, et vite. Jeremy et la salamandre valaient chacune quatre mille. Je ne travaillais plus beaucoup pour la Guilde et des contrats de cette ampleur n'étaient pas courants. Même partagée avec Jim, la prime couvrirait mes hypothèques pendant deux mois. L'idée de laisser quatre mille sur le sol me rendait physiquement malade. Je regardai Jeremy. Puis la salamandre. Toujours des choix ... 9 L'employé des primes de la Guilde des Mercenaires, un homme petit, soigné, aux cheveux foncés, regardait la tête de Jeremy sur le comptoir. _Où est le reste? _J'ai eu un petit problème de logistique. Le visage de l'employé s'éclaira d'un large sourire. _Jim t'a laissé tomber, hein?Il n'y aura qu'un ticket de capture alors ? _Deux tickets. Jim pouvait se comporter comme un trouduc mais je ne le baiserais pas sur sa part. Il aurait le ticket de capture qui lui donnait droit à la moitié de la prime. _Kate, tu es vraiment une vrai poire. Je me penchai sur le comptoir et lui dédia mon meilleur sourire dérangé. _Tu veux toucher pour voir si je suis trop mûre ? _Non merci. ( L'employé balança le tas de formulaires sur le comptoir.) Remplis ça. La pile de documents faisait près de trois centimètres d'épaisseur et promettait de m'occuper pendant une bonne heure. La guilde avait des règles plutot lâches – en tant qu'organisation de mercenaires, elle s'intéressait de près a l'argent et se foutait généralement du reste _ mais une mort devait être rapportée au flics et nécessitait donc de la paperasse. La vie insignifiante de Jeremy était réduite au prix de sa tête et à des tas de petites cases à remplir. 10
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