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Arthur Golden Geisha PDF

589 Pages·2012·2.47 MB·French
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ARTHUR GOLDEN Geisha ROMAN TRADUIT DE L'ANGLAIS (ÉTATS-UNIS) PARANNIE HAN JC LATTÈS MEMOIRS OF A GEISHA Publié par Alfred A. Knopf, Inc. © Arthur Golden, 1997. © Éditions Jean-Claude Lattès, 1999, pour la traduction française, publiée avec l'accord de Alfred A. Knopf, Inc. Pour ma femme, Trudy, et mes enfants, Hays et Tess. Prologue Un soir du printemps 1936, je suis allé voir un spectacle de danse à Kyoto avec mon père. J'avais quatorze ans. Aujourd'hui, cette soirée évoque deux choses pour moi. D'une part, mon père et moi étions les seuls Occidentaux dans la salle. Nous étions arrivés de Hollande, notre pays d'origine, quelques semaines plus tôt, et cet exil culturel me pesait encore. Par ailleurs, j'étais enfin capable, après des mois d'étude intensive de la langue japonaise, de comprendre des bribes de conversations, entendues ici et là. Quant aux jeunes Japonaises qui dansaient sur scène, devant moi, je n'en ai gardé aucun souvenir, hormis celui de kimonos très colorés. Je ne pouvais me douter que cinquante ans plus tard, à New York, l'une d'elles deviendrait mon amie, et me dicte- rait l'histoire extraordinaire de sa vie. En ma qualité d'historien, j'ai toujours considéré les mémoires comme des textes de référence. Dans les mémoires, on ne découvre pas tant l'auteur que son univers. Des mémoires diffèrent d'une biographie, car la personne qui les rédige n'a jamais la distance que possède, à l'évidence, le biographe. L'autobiographie, si une telle chose existe, revient à demander à un lapin à quoi il ressemble, quand il fait des bonds dans l'herbe du pré. D'un autre côté, si nous voulons des détails sur ce pré, personne n'est mieux placé que lui pour nous en parler - à l'exception de tout ce qu'il n'est pas en mesure d'observer. Je dis cela avec l'assurance de l'universitaire qui a bâti sa carrière sur de telles distinctions. Je dois cependant avouer que les mémoires de ma chère amie Nitta Sayuri m'ont incité à réviser mon point de vue. Elle nous fait pénétrer dans cet univers méconnu où elle a vécu - le champ vu par le lapin, si vous préférez. Il pourrait bien ne pas exister de meilleur témoignage que le sien sur la vie de geisha, existence ô combien étrange. Et puis Sayuri se livre ici totalement. Nous avons d'elle un tableau bien plus précis et irrésistible que tout ce qu'on a pu lire dans ce chapitre intermi- nable de «Joyaux Scintillants du Japon», ou dans divers magazines ayant publié des articles à son sujet, au fil des années. Et pour une fois, du moins sur un sujet d'une telle originalité, personne n'aura aussi bien connu le personnage principal que l'auteur elle- même. C'est essentiellement une question de chance, si Sayuri a accédé à la célébrité. D'autres femmes ont mené des existences semblables. L'illustre Kato Yuki - une geisha qui conquit le cœur de George Morgan, neveu de J. Pierpont et devint sa fiancée du bout du monde durant la première décennie de ce siècle - pourrait bien avoir eu une vie encore plus extraordinaire que Sayuri. Mais seule Sayuri nous a livré sa propre histoire de façon aussi riche. J'ai longtemps cru que c'était là le fruit du hasard. Si Sayuri était restée au Japon, sa vie eût été trop remplie pour qu'elle pût songer à rédiger ses mémoires. En 1956, cependant, Sayuri fut amenée à émigrer aux États-Unis, suite à divers événements dans sa vie. Durant les quarante années qui lui restaient à vivre, Sayuri résida dans les « tours Waldorf », à New York, où elle s'aménagea une élé- gante suite japonaise, au trente-deuxième étage. Là, elle continua à mener une existence trépidante. Sa suite vit défiler un nombre impressionnant d'artistes japonais, d'intellectuels, de célébrités du monde des affaires - et même des ministres et un ou deux gangsters. J'ai fait la connaissance de Sayuri en 1985, quand un ami commun nous a présentés. En tant que spécialiste du Japon, j'a^s rencontré le nom de Sayuri, mais je ne savais presque rien d'elle. Au fil des années, nous avons établi de véritables rapports d'amitié, et elle m'a fait de plus en plus de confidences. Un jour, je lui ai demandé si elle accepterait jamais de raconter son histoire. — Je pourrais y consentir, Jakob-san, si c'est vous qui la racontez, me dit-elle. Ainsi nous avons entrepris notre tâche. Sayuri a préféré dicter ses mémoires, plutôt que les écrire elle- même. En effet, elle était tellement habituée au tête-à- tête, qu'elle eût été désemparée, sans personne dans la pièce pour l'écouter. Le manuscrit m'a été dicté sur une période de dix-huit mois. Sayuri parlait le dialecte de Kyoto - dans lequel les geishas se donnent souvent le nom de « geiko » et où l'on appelle parfois « obebe » le kimono. C'est en m'interrogeant sur la façon dont j'allais rendre ce dialecte dans ma traduction, que j'en saisis toutes les subtilités. Dès le départ, l'univers de Sayuri m'a captivé. A de rares exceptions près, nous nous retrouvions le soir. C'était, depuis toujours, le moment où Sayuri avait l'esprit le plus vif. Généralement, elle préférait travailler dans sa suite des tours Waldorf, mais, de temps à autre, nous avions rendez- vous dans un salon privé d'un restaurant japonais de Park Avenue, dont elle était une habituée. Nos séances de travail duraient généralement deux ou trois heures. Nous les enregistrions. Cependant, la secrétaire de Sayuri était présente, afin de transcrire sa dictée, ce qu'elle faisait très fidèlement. Mais Sayuri ne parlait ni au magnétophone, ni à sa secrétaire. Elle s'adressait à moi. Quand elle était bloquée dans son récit, c'était moi qui la guidais. Je me considérais comme l'assise de l'entreprise, et j'avais le sentiment que son histoire n'aurait jamais été contée si je n'avais pas gagné sa confiance. A présent, j'en suis venu à penser que la vérité pourrait être tout autre. Sayuri m'a choisi comme copiste, sans nul doute, mais elle pouvait très bien avoir attendu le candidat idéal depuis toujours. D'où la question : pourquoi Sayuri a-t-elle souhaité que l'on raconte son histoire ? Si les geishas ne sont pas tenues au silence, elles n'existent qu'en vertu de cette convention singulièrement japonaise : les choses qui se passent le matin au bureau et celles qui ont lieu le soir, derrière des portes closes, sont sans rapport et doivent rester compartimentées. Les geishas ne témoignent pas de leurs expériences. Tout comme les prostituées, leurs homologues de moindre classe, les geishas connaissent des détails privés sur des personnages publics. Il y a donc une garantie de discrétion tacite, ce qui sans doute honore ces papillons de nuit. La geisha qui trahit cette confiance se met dans une position impossible. Sayuri a pu raconter son histoire, car elle se trouvait dans une situation particulière. En effet, plus personne au Japon n'avait de pouvoir sur elle. Elle avait rompu tous liens avec son pays natal. Est-ce pour ça qu'elle ne s'est plus sentie tenue au silence ? Peut- être. Mais cela n'explique pas pourquoi elle a choisi de parler. J'ai préféré ne pas soulever la question en sa présence. Et si elle avait soudain des scrupules et changeait d'avis ? me disais-je. Même une fois le manuscrit achevé, je n'ai pas osé lui poser la question. Quand elle a reçu l'avance de son éditeur, j'ai estimé que je ne risquais plus rien, et je l'ai interrogée : pourquoi avait- elle voulu faire de sa vie un document ? — A quoi d'autre pourrais-je occuper mon temps, à présent ? a-t-elle répondu. Que ses raisons aient été - ou non - aussi simples que cela, le lecteur en jugera. Bien qu'elle très désireuse que sa biographie vît le jour, Sayuri posa certaines conditions à cette parution. Le manuscrit ne devait être publié qu'après sa mort, et après la disparition de plusieurs hommes ayant joué un rôle crucial dans sa vie. Il se trouva qu'ils la précédèrent tous dans la tombe. Sayuri voulait éviter que ses révélations plongent quiconque dans l'embarras. Chaque fois que ç'a été possible, j'ai laissé les noms, même si Sayuri n'a pas révélé l'identité de certains protagonistes, y compris à moi, obéissant à cette convention, commune aux geishas, de se référer à leurs clients par le biais d'un sobriquet. Le lecteur croisera des personnages comme M. Chutes de Neige - qui doit son surnom à ses pellicules. Si ce même lecteur croit que Sayuri essaie seulement d'être drôle, il pourrait n'avoir pas saisi sa véritable intention. Lorsque j'ai demandé à Sayuri la permission d'utiliser un magnétophone, je voulais seulement me prémunir contre toute éventuelle erreur de transcription de la part de sa secrétaire. Toutefois, depuis sa mort, l'année dernière, je me suis demandé si je n'aurais pas eu une autre raison : garder un enregistrement de sa voix, si expressive. Le plus souvent, elle parlait d'une voix douce, comme on pourrait s'y attendre chez une femme dont le métier était de s'entretenir avec des hommes. Mais lorsqu'elle me rejouait une scène de sa vie, sa voix me donnait l'illusion qu'il y avait sept ou huit personnes dans la pièce. Il m'arrive encore, le soir, de me repasser ses bandes dans mon bureau, et d'avoir réellement du mal à croire qu'elle n'est plus de ce monde. Jakob Haarhuis Arnold Rusoff professeur d'histoire du Japon Université de New York 1 Imaginez : nous serions assis, vous et moi, dans une pièce donnant sur un jardin, au calme, à bavarder, à siroter notre thé vert, nous évoquerions un événement du passé et je vous dirais : « L'après- midi où j'ai rencontré un tel... a été à la fois le plus beau et le pire après-midi de ma vie. » Sans doute poseriez-vous votre tasse et diriez-vous : « Enfin, il faudrait savoir. Le pire, ou le plus beau ? Car ça ne peut pas être les deux ! » Je devrais rire de moi et vous donner raison. Mais la vérité, c'est que l'après- midi où j'ai rencontré M. Tanaka Ichiro a réellement été le plus beau et le pire de ma vie. Je le trouvais si fascinant, même l'odeur de poisson sur ses mains était comme un parfum. Si je n'avais pas rencontré cet homme, je suis sûre que je ne serais jamais devenue geisha. Mes origines et mon éducation ne me prédisposaient pas à devenir geisha à Kyoto. Je ne suis même pas née à Kyoto. Je suis la fille d'un pêcheur d'une petite ville du nom de Yoroido, sur la mer du Japon. Je n'ai parlé de tout cela qu'à très peu de gens : Yoroido, la maison de mon enfance, ma mère, mon père, ma sœur aînée. Et encore, je ne leur ai pas dit comment j'étais devenue geisha, ou ce que c'était que d'être geisha. La plupart des gens préféraient garder ce fantasme d'une petite fille, dont la mère et la grand-mère étaient geishas, qui avait dû apprendre la danse dès son plus jeune âge, et cetera. En fait, il y a bien des années, je servais une tasse de saké à un homme qui me dit être allé à Yoroido la semaine précédente. J'ai eu cette sensation que doit

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