Analyse Complexe Alain Yger Institut de Mathe(cid:19)matiques, Universite(cid:19) Bordeaux 1, Talence 33405, France E-mail address: [email protected] Version du 5 janvier 2014. Re(cid:19)sume(cid:19). Cecoursvise`apr´esenter,auniveauM1,tantlesaspectsanalytiques, alg´ebriques, g´eom´etriques (sans n´egliger leur accompagnement historique et culturel)del’AnalyseComplexeenunevariable.Ilcorrespond`al’enseignement decetteUE`al’Automne2013. Table des mati`eres Introduction 1 Chapitre 1. Le plan complexe et les formes diff´erentielles dans le plan 3 1.1. Le plan complexe et ses compactifications 3 1.2. Formes diff´erentielles dans un ouvert du plan complexe 10 1.3. Int´egration des formes diff´erentielles 20 1.4. Formes localement exactes et chemins continus 38 Chapitre 2. Holomorphie et analyticit´e 55 2.1. Fonctions holomorphes : plusieurs points de vue 55 2.2. Formules de Cauchy et analyticit´e 65 2.3. Les in´egalit´es de Cauchy et leurs cons´equences 76 Chapitre 3. Singularit´es isol´ees, m´eromorphie et th´eor`emes d’approximation 89 3.1. Singularit´es isol´ees des fonctions holomorphes 89 3.2. Types de singularit´es isol´ees, m´eromorphie 99 3.3. Th´eor`eme de Weierstraß et r´esolution du ∂ 124 Chapitre 4. Fonctions harmoniques dans le plan 147 4.1. Harmonicit´e et sous-harmonicit´e 147 4.2. Autour du probl`eme de Dirichlet 153 4.3. Formules de Jensen et Poisson-Jensen 170 Annexe A. Texte et corrig´e du DS - 2011-2012 177 Annexe B. Texte et corrig´e - Examen 2011-2012 187 Annexe C. Texte et corrig´e du DS - 2012-2013 199 Annexe D. Texte et corrig´e - Examen 2012-2013 209 Annexe E. Texte et corrig´e du DS - 2013-2014 225 Annexe F. Texte et corrig´e - Examen 2013-2014 227 Bibliographie 237 Index 239 v Introduction Cecourssupposecommepr´erequislebagageconcernantless´eriesdefonctions, en particulier les s´eries enti`eres et les s´eries de Fourier, acquis en Licence 2 (dans l’UE Analyse 3, ex UE MHT 401 [Y0]), ainsi que les bases du calcul diff´erentiel acquises en Licence 3 (dans l’UE Calcul Diff´erentiel et Equations Diff´erentielles, exUEMHT513);leguidesousleserveurUlysse1≪Annales : Contrat MAT401 Printemps 2007≫ (s´eances 7,8,9) vous permettra en particulier de r´eviser vos ac- quis de Licence en ce qui concerne les s´eries enti`eres et l’analyticit´e; pour ce qui est des bases de calcul diff´erentiel n´ecessaires, les chapitres 14-15-16 de [MathL2] contiennent tous les outils qui me seront utiles. Au travers de ce cours, on entend d´egagercertainesid´eesinvitant`adesprolongementsult´erieurs,tantsurl’angleana- lytiquequeg´eom´etrique,voiretopologique(analysecomplexeenplusieursvariables, surfaces de Riemann). Les principaux ouvrages dont je me suis inspir´e, outre les chapitres 1-2-4 de [Y], sont ceux de Carlos Berenstein et Roger Gay ([BG], cha- pitres 1-2-3-4, l’ouvrage qui a inspir´e la r´edaction de [Y]), d’Eric Amar et Etienne Matheron [AM], de Mats Andersson [And]. On ajoutera aussi le livre (aujour- d’huitr`esclassique)deWalterRudin[Rud],r´ef´erencebienconnuedescandidats`a l’agr´egation.Lepolycopi´er´edig´eparPhilippeCharpentier[Charp]pourl’UEMHT 734 (`a 9 ECTS, `a laquelle cette nouvelle UE, cette fois `a 6 ECTS, se substitue) m’aaussibeaucoupservi;lesexercicesaccompagnantcecourscorrespondentenfait pourlaplupartauxexercicesd’accompagnementdecetteUEMHT734pendantles ann´ees 2009-2010 et 2010-2011; beaucoup sont extraits des listes d’exercices (non corrig´es)de[BG];onlestrouveraregroup´essousformedefascicule(d´etaill´es,mais non corrig´es2) dans [Y1]. Il faut toutefois signaler que l’UE MHT 734 ´etant une UE`a9ECTS,soncontenuenglobedespointsquineserontpas´evoqu´esici:formes diff´erentielles et calcul ext´erieur en dimension n>2, analyse harmonique dans Rn avec n>2, th´eor`eme de Riemann et repr´esentation conforme, th´eor`eme de la mo- nodromie, etc. La lecture du polycopi´e [Charp] permet aux ´etudiants int´eress´es d’aller au del`a de ces notes de cours. Les aspects culturels et historiques de l’Ana- lyse complexe ne sont pas `a n´egliger. Toutes les r´ef´erences historiques ´emaillant ces notes sont extraites du site http://www.gap-system.org/∼ history auquel j’invite vivement `a se reporter pour situer les noms et le cheminement des id´ees au travers des si`ecles (du XVIII-i`eme au XX-i`eme), en des temps ou` l’analyse com- plexe a constitu´e tant un fil directeur (et unificateur) qu’un pr´ecieux auxiliaire, ce pr´ecis´ement `a l’heure ou` les calculateurs efficaces n´es avec l’informatique n’exis- taient pas encore! 1. Y acc´eder par l’espace Formation sous votre ENT et d´erouler les onglets `a partir de Formation initiale pour trouver ce guide sous le site de la Licence Math´ematiques, Parcours Math´ematiquesFondamentales,semestre4. 2. Certainscependant,pr´esent´essousuneformeparfoisdiff´erente,sontcorrig´esdans[Y]. 1 CHAPITRE 1 Le plan complexe et les formes diff´erentielles dans le plan 1.1. Le plan complexe et ses compactifications 1.1.1. Deux structures sur R2. L’ensembleR2 descouplesdenombresr´eels est naturellement ´equip´e d’une structure de R-espace vectoriel; c’est le plan (vec- toriel) r´eel. Le choix du point O = (0,0) comme origine et de la base canonique (⃗i,⃗j) comme base de ce R-espace vectoriel fournit un rep`ere (orthornorm´e pour le produitscalaireusuel)pourleR-espace affinecorrespondant,ditplan (affine) r´eel. On sait d’autre part qu’il existe une correspondance biunivoque entre R2 et C via (1.1) (x,y)←→x+iy (au point M de coordonn´ees (x,y) dans le rep`ere (O;⃗i,⃗j), on associe son affixe). L’ensemble R2 peut ainsiˆetre´equip´e d’une structure de C-espace vectoriel, la mul- tiplication externe ´etant (α+iβ)·(x,y)=(αx−βy,αy+βx), ce en conformit´e avec la r`egle de calcul alg´ebrique (α+iβ)×(x+iy)=(αx−βy)+i(αy+βx) et la correspondance biunivoque (1.1) entre les points du plan affine r´eel et leurs affixes. L’ensemble des couples (x,y) de nombres r´eels, une fois identifi´e `a C et ´equip´e de cette structure de C-espace vectoriel, est le plan (vectoriel) complexe. Il s’agitd’unC-espacevectorieldedimension1(alorsqu’aveclastructuredeR-espace vectoriel, nous avions affaire `a un R-espace vectoriel de dimension 2). En prenant comme rep`ere (0;1) (1´etant ici le nombre complexe 1×1+0×i), on dispose d’un rep`ere pour le C-espace affine correspondant, dit plan complexe. Notons toutefois que cette terminologie est ´equivoque car il s’agit d’un C-espace vectoriel complexe de dimension 1, donc d’une droite complexe, et non d’un plan! On la conserve n´eanmoins dans la pratique courante. Les points de R2 sont ainsi rep´er´es de deux mani`eres : – par le couple (x,y) de leurs coordonn´ees cart´esiennes, R2 (vu comme plan affine r´eel, ´equip´e de sa structure de R-espace affine de dimension 2) ´etant rapport´e au rep`ere (O;⃗i,⃗j); – parleuraffixecomplexe z =x+iy, R2 ´etantici vucommele plancomplexe, c’est-`a-direleC-espaceaffineC(´equip´edesastructuredeC-espacevectoriel de dimension 1). 3 4 1.LE PLAN COMPLEXE ET LES FORMES DIFFE´RENTIELLES DANS LE PLAN La conjugaison complexe z 7→z sera appel´ee `a jouer un rˆole majeur . Les formules de ≪passage≫ des coordonn´ees (x,y) aux ≪fausses coordonn´ees≫ (z,z) sont z =x+iy z =x−iy (1.2) z+z z−z x= y = . 2 2i Laraisonpourlaquellenousparlonsde≪faussescoordonn´ees≫`aproposducouple (z,z)estlasuivante:aucontrairede(x,y),lecouple(z,z)nesauraitˆetreinterpr´et´e comme un syst`eme de param`etres ind´ependants car z est fonction de z (c’est le conjugu´e)! Le param`etre complexe z =x+iy int`egre `a lui seul les deux degr´es de libert´edontd´ependlepointcourantdeR2;aveclaconnaissance`alafoisdez etz, nousavonsautomatiquementuneinformationredondante.Nousverronscependant danslasuitedececoursquelesformules(1.2)s’av`ererontn´eanmoinsutiles:onfera ≪commesi≫ lecouple (z,z)joue lerˆoled’uncouple deparam`etresind´ependants: une fonction (x,y)7→f(x,y) d’un ouvert U de R2, `a valeurs dans C, s’exprime en effet, grˆace aux formules (1.2), comme une fonction g de z et z (d´efinie cette fois dans U ×conj(U)) : ( ) z+z z−z ∀(x,y)∈U, f(x,y)=f , =g(z,z). 2 2i Un autre rep´erage des points du plan complexe (ramen´e au rep`ere (O;⃗i,⃗j)) s’av`ere possible. C’est le rep´erage polaire, ou`, pour z ∈C∗, √ r(z)=|z|= x2+y2 θ(z)=arg(z) (1.3) z =r exp(iθ)=r(cosθ+isinθ). Si z = 0, on a r = 0, mais la d´efinition de l’argument devient irrelevante. Notons que dans cette formule (1.3), l’exponentielle complexe est d´efinie comme la somme de la s´erie enti`ere (de rayon de convergence +∞, voir le cours de MHT 401, on y reviendra plus loin) ∑∞ wk exp(w):= ∀w ∈C, k! k=0 lesfonctionstrigonom´etriques(complexes)cosetsins’end´eduisantparlesrelations d’Euler exp(iw)+exp(−iw) exp(iw)−exp(−iw) (1.4) cosw := sinw := ∀w ∈C. 2 2i En revanche, la ≪fonction≫ z 7→argz n’est pas une fonction au sens usuel (`a une entr´eez,onn’associepasune≪valeur≫argz);l’argumenteneffetn’estd´efinique modulo2π etcequel’onconvientdenoterargz,lorsquez estunnombrecomplexe non nul, est l’ensemble de toutes les d´eterminations possibles de l’argument, parmi elleslad´etermination(diteprincipale),quel’onnoteArgz,etquiestparconvention celle appartenant `a l’intervalle ]−π,π]; ainsi, si z ∈C∗, { ( √ ) 2arctan y/(x+ x2+y2) +2πZ si z ∈/]−∞,0[ argz =Argz+2πZ= π+2πZ si z ∈]−∞,0[ 1.1.LE PLAN COMPLEXE ET SES COMPACTIFICATIONS 5 N 2 S (u,v,w) * + + 2 (x,y) R ++ (x,y) * |z|=1 * (u,v,w) * S Figure 1.1. Sph`ere de Riemann et projection st´er´eographique Notons au passage que la fonction z 7→Argz est bien C∞ dans C\]−∞,0] au vu de son expression analytique1 : ( √ ) (1.5) Arg(x+iy)=2arctan y/(x+ x2+y2) ∀z ∈C\]−∞,0]. On dit que la fonction z ∈ C∗ 7→ argz est une fonction multivalu´ee ou encore une fonction multivalente2 au lieu d’une fonction au sens classique du terme (c’est-`a- dire monovalu´ee ou encore monovalente). 1.1.2. La sph`ere de Riemann. Il est commode de r´ealiser une compactifi- cation du plan complexe (´equip´e de sa topologie d’espace m´etrique usuelle, celle de R2) en lui adjoignant un point dit point `a l’infini. Une mani`ere de concr´etiser cette r´ealisation consiste `a plonger R2 dans R3 via x,y x,y,t (x,y)7→(x,y,0) (R2 est alors consid´er´e comme {(x,y,0); (x,y) ∈ R2} = {t = 0}) et `a consid´erer x,y la sph`ere unit´e S2 :={(u,v,w)∈R3; u2+v2+w2 =1} et son pˆole nord N := (0,0,1). On parle de sph`ere de Riemann3 pour d´esigner S2 autraversdesarelationavecleplancomplexe(relationquenousallonsexpliciter). La figure 1.1 illustre les constructions qui vont suivre. La projection st´er´eographique depuis le pˆole nord est l’application π+ de S2\{N} dansR2d´efinieainsi:aupoint(u,v,w)deS2\{N},onassocielepointπ+(u,v,w)= (x+(u,v,w),y+(u,v,w),0)duplan{t=0}≃R2 ou`ladroiteissuedeN etpassant x,y 1. V´erifierl`aenexerciceenvousaidantdefiguresdansleplan. 2. Cesqualificatifsont´et´eintroduitsauXIX-i`emesi`ecle.Ilestimportantdesoulignerquele conceptde≪fonction≫`acette´epoque´etaitbiensouventceluidefonctionmultivalente. 3. E´l`eve de Gauß, Bernhard Riemann (1826-1866) a pos´e dans son trait´e de 1854 ≪Sur les hypoth`eses sur lesquelles reposent les fondements de la g´eom´etrie≫ les bases de ce qui allait devenir la g´eom´etrie diff´erentielle. Au travers de l’´etude des surfaces (plus particuli`erement des surfaces de Riemann, dont C et S2 sont des exemples), le couplage avec l’analyse complexe est omnipr´esentdanssestravaux. 6 1.LE PLAN COMPLEXE ET LES FORMES DIFFE´RENTIELLES DANS LE PLAN par(u,v,w)perceceplan.Paruncalculimm´ediat(bas´esurleth´eor`emedeThal`es), on trouve u v (1.6) x+(u,v,w)= y+(u,v,w)= . 1−w 1−w Cette application π+ de S2\{N} dans R2 ≃ {t = 0} s’av`ere ˆetre bijective et son inverse est l’application (1.7) ( ) 2x 2y x2+y2−1 (x,y,0)7−→(u(x,y),v(x,y),w(x,y))= , , . 1+x2+y2 1+x2+y2 1+x2+y2 Ainsi le plan complexe se trouve-t’il en bijection (il s’agit mˆeme en fait d’un diff´eomorphisme C∞) avec S2\{N}; le pˆole sud de S2 correspond `a l’origine (0,0) duplan.LepˆolenordN deS2 estnaturellementinterpr´et´ecommelepoint`al’infini du plan complexe. On peut r´ep´eter cette op´eration avec le pˆole sud S et consid´erer cette fois l’appli- cation π− de S2\S dans R2 qui au point (u,v,w) de S2\{S} associe le point (1.8) π−(u,v,w)=(x−(u,v,w),−y−(u,v,w),0), ou` (x−(u,v,w),y−(u,v,w),0) d´esigne le point ou` la droite issue de S et passant par(u,v,w)perceleplan{t=0}≃R2 .Laraisonpourlaquelleonintroduiticile x,y signe − devant y−(u,v,w) est le souci de respecter la coh´erence des orientations : si(⃗i,⃗j,⃗k)d´esignelabasecanoniquedeR3,lerep`ere(⃗i,⃗j,−⃗k)n’estplusdirectdans R3, alors que le rep`ere (⃗i,−⃗j,−⃗k) l’est! Toujours grˆace au th´eor`eme de Thal`es, on trouve cette fois u v − − (1.9) x (u,v,w)= y (u,v,w)= . 1+w 1+w L’application π− de S2\{S} dans R2 s’av`ere ˆetre bijective et son inverse est l’ap- plication (1.10) ( ) 2x 2y 1−x2−y2 (x,y,0)7−→(u(x,y),v(x,y),w(x,y))= ,− , . 1+x2+y2 1+x2+y2 1+x2+y2 Ainsi le plan complexe se trouve-t’il aussi en bijection (il s’agit encore ici d’un diff´eomorphisme C∞) avec S2\{S}; le pˆole nord N de S2 correspond cette fois `a l’origine (0,0) du plan, tandis que le pˆole sud S est maintenant interpr´et´e comme le point `a l’infini du plan complexe. Un calcul s’av`ere particuli`erement instructif ici : il est clair que π+◦(π−)−1 est un diff´eomorphismeC∞ entreleplanR2 priv´edel’origine(0,0)etlui-mˆeme.Lecalcul donne, pour (x,y)∈R2\{(0,0)}, ( ) 2x 2y 1−x2−y2 (π+◦(π−)−1)(x,y)=π+ ,− , 1+x2+y2 1+x2+y2 1+x2+y2 (1.11) ( ) x y = ,− . x2+y2 x2+y2
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