2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page1 Crédits photos / Agence Jean-Paul Viguier et associés L’Institut Universitaire du Cancer : l’hôpital multipartenarial d’excellence en cancérologie N AI Au cœur de l'Oncopôle de Toulouse, l’activité de soins aux malades sera centrée autour M d’un pôle clinique très novateur, l'Institut universitaire du cancer (IUC) qui accueillera E D toutes les équipes et tous les équipements de l'Institut Claudius Regaud et certaines ac- E D tivités de cancérologie du CHU de Toulouse. Les autres partenaires de ce projet sont les L cliniques privées et le secteur médical libéral, l’Etablissement Français du Sang, le réseau A PIT régional de cancérologie ONCOMIP, et l’Université et les Centres hospitaliers généraux. Vé- Ö ritable plateforme d’échanges entre tous les professionnels, l’organisation de cet hôpital H dédié aux soins innovants préfigurera les futurs centres d'oncologie. L’IUC va offrir à Présentation du projet avec chaque patient des soins d’excellence et un accès privilégié à l’innovation. Une équipe plu- Jean-Jacques Romatet, ridisciplinaire définira pour chaque patient un projet personnalisé de soins sur un mode col- administrateur du GCS CUC laboratif. Elle comprendra des professionnels issus du CHU et de l’Institut Claudius Regaud ainsi que les équipes de tous les partenaires, notamment les chercheurs. Cette proximité inédite entre soins et recherche permettra de proposer une médecine individualisée s’ap- puyant sur le profil génomique des tumeurs. L’objectif fixé de raccourcir les délais entre les découvertes et les applications thérapeutiques, est rendu possible par le continuum « soins, recherche clinique et recherche fondamentale ». De part sa composition multi- partenariale, l’IUC va participer, dans l’intérêt des patients, au décloisonnement des ac- teurs et à la promotion d’actions communes entre opérateurs publics et privés de la cancérologie. Elle développera et optimisera l’offre de recherche en cancérologie en lien avec les unités de recherche de l’Inserm, du CNRS et de l’Université, tout en donnant au secteur privé et aux hôpitaux généraux la possibilité d’accéder aux plates-formes tech- nologiques de diagnostic et de traitement et aux projets de recherche et d’innovation. 102 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page2 Architecture hospitaliere - numéro 5 - novembre 2012L’Institut Universitaire du Cancer En tant que directeur général du CHU de Toulouse, comment tous les arbitrages finaux, à vaincre les dernières craintes des définiriez-vous le projet de l’Institut Universitaire du Cancer ? uns et des autres et à démarrer dans de bonnes conditions, Jean-Jacques Romatet :L’Institut Universitaire du Cancer est l’ouverture étant prévue pour le début de l’année 2014. une opportunité exceptionnelle pour toute la communauté tou- lousaine de mettre en œuvre un projet d'importance et de qua- Comment voyez-vous l'évolution de la prise en charge du lité européenne. Le CHU de Toulouse se positionne comme un cancer avec ce nouvel outil ? partenaire totalement engagé dans l’évolution de ce futur IUC. J.J.R :Selon moi, le véritable coup d’accélérateur réside dans Tout le personnel de l’établissement et toute la communauté cette politique qui intègre la recherche et le soin. Tout le projet médicale sont très fortement engagés dans la définition de ce de l’Institut Universitaire du Cancer a été pensé autour de cette nouvel outil partagé mais aussi dans la redéfinition complète idée très forte puisque, dès le début, nous avons cherché à in- de la politique de la cancérologie sur le site toulousain. tégrer sur un même site ces trois dimensions du soin, de l’en- seignement et de la recherche. Dans ce contexte, nous serons L’IUC va accueillir du personnel du CHU mais aussi de plus attractifs pour le monde industriel, en particulier pharma- l'Institut Claudius Regaud. Est-ce compliqué de regrouper ceutique, et nous aurons la possibilité de faire bénéficier à tous deux entités aux statuts juridiques différents mais aussi nos patients de traitements toujours plus innovants. aux pratiques et usages différents ? J.J.R :Il est effectivement compliqué de regrouper deux entités aussi différentes mais nous avons privilégié l’efficacité du projet médical avant de nous appesantir sur toutes les difficultés pra- tiques, juridiques ou encore culturelles. C’est parce que nous avions comme objectif un projet très ambitieux que nous avons pu dépasser tous ces problèmes administratifs. Sans ambition importante et partagée, nous ne trouverions que des difficultés... Plus de précisions avec Martine Benoit-Rigeot, directeur de projet Quelle a été la réaction des équipes du CHU par rapport à ce regroupement ? Quelle est votre mission dans le cadre du projet d’Institut J.J.R :Au début, le personnel a été assez circonspect dans la Universitaire du Cancer (IUC) ? mesure où ce projet allait complètement chambouler le projet Martine Benoit-Rigeot :Ma mission est de conduire le projet médical de l'établissement. Ensuite, nous nous sommes mis en à son terme, dans le respect de l’épure économique fixée par les mouvement et pris conscience de l’importance de ce nouveau pouvoirs publics, et les délais d’ouverture prévue pour le premier projet jusqu'à l’intégrer complètement dans la stratégie du CHU. trimestre 2014, tout en veillant à maintenir le niveau d’ambition initial du projet. Quels sont vos liens avec les autres partenaires de l’IUC ? J.J.R : Nous avons des liens très étroits avec les centres hos- Comment définiriez-vous cet établissement ? pitaliers, des liens cordiaux avec les partenaires libéraux, des M.B-R : Je définirais l’IUC comme un établissement novateur, liens quotidiens avec le centre de transfusion sanguine et des voire expérimental, par son double mariage : le mariage de liens pratiquement intimes avec l’Université. Enfin, nous deux établissements : un CHU et un CLCC, et le mariage de l’hôpital sommes partie prenante du réseau ONCOMIP dont l’actuelle et de la recherche dans un concept continuum soins/recherche. présidente est justement une hospitalière du CHU. Cependant, Et puis son originalité vient aussi de son environnement, les équipes travaillaient déjà bien ensemble et les rapports ont puisqu’il est construit au cœur d’un campus dédié à la recherche toujours été cordiaux. en cancérologie, publique et privée unique en France. L’IUC aura les missions classiques d’un établissement dédié à la lutte Quel est l'impact de la création d’un tel institut pour le contre le cancer, mais aussi des missions d’enseignement uni- CHU ? versitaire, de recherche clinique notamment sur les essais J.J.R :L'impact se situe à plusieurs niveaux. Ce projet a d’abord précoces, et d’articulation très étroite avec la recherche fonda- un effet sur toute la politique « cancer » puisque nous avons dû mentale en cancérologie. L’IUC accordera une priorité absolue la repenser et la réorganiser entièrement au niveau de l’éta- à l’innovation. blissement. Il existe également plusieurs effets « collatéraux » plutôt positifs. En nous permettant de déménager certains services Dans quel contexte s’inscrit ce projet d’IUC ? du CHU vers ce bâtiment neuf, ce projet nous a permis de libérer M.B-R :Ce projet s'inscrit dans la grande cause nationale de des locaux pour accueillir d’autres services de l’établissement. lutte contre le cancer, et en complète cohérence avec les plans cancer 1 et 2. Mais aussi dans un concept de Cluster dédié à la Quelles sont les prochaines étapes pour cet IUC ? cancérologie. Ce campus sera également pour Toulouse un nouveau J.J.R : L'étape la plus difficile est toujours la suivante. Les pré- pôle économique puisqu’à terme environ 4000 personnes y cédentes sont, par définition, plus faciles puisqu'elles sont pas- travailleront. 103 sées ! Au niveau de l’IUC, la prochaine étape consiste à réaliser 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page4 Architecture hospitaliere - numéro 5 - novembre 2012L’Institut Universitaire du Cancer Où en est-on en matière de lutte contre le Cancer en CHRU et ICR. En ce qui concerne l’aspect coopération de ce Midi-Pyrénées ? projet d’établissement, une charte d'engagement des établis- M.B-R :Aujourd'hui, en MIP, au niveau de la prise en charge des sements publics et privés partenaires de l’IUC a été signée en patients, nous sommes au même niveau que l'ensemble des 2011. Celle-ci trace les grandes orientations de la coopération grandes régions françaises avec la présence d’un CHU, d’un et les objectifs communs d’amélioration de la prise en charge CLCC et d’un nombre significatif d’établissements de santé pu- des patients mais aussi du développement de la recherche blics et privés autorisés pour les activité en cancérologie . Grâce clinique. à ce projet une véritable synergie s’organise en MIP pour œuvrer ensemble dans la lutte contre le cancer avec la volonté de tous Quelles ont été les difficultés rencontrées ? les établissements de tendre vers l’excellence dans la prise en M.B-R : Elles sont essentiellement liées aux difficultés inhé- charge des patients, dans l’amélioration de leur accès aux trai- rentes à tout rapprochement de structures, de statuts différents, tements innovants, et dans l’accélération de la recherche en et de cultures différentes. Des difficultés que l’on retrouve dans cancérologie. la plupart des projets de coopération et de rapprochement entre établissements. Un travail important sur la conduite de chan- Qui sont les partenaires de cet IUC ? gement est mené en amont de l’ouverture de l’IUC afin de créer M.B-R : Avant tout, ce sont les 7 membres fondateurs du Grou- les conditions d’une identité commune par l’adhésion au projet, pement de Coopération Sanitaire, Maître d’Ouvrage de la entre les différents acteurs qui travailleront sur un même site construction de l’Institut Universitaire du Cancer : l'Institut Claudius autour d’un projet médical unique avec un système d’informa- Regaud (CLCC), le CRHU de Toulouse, l'Université Paul Sabatier, tion commun. Ce SIH très ambitieux va permettre aussi la mise le réseau régional ONCOMIP, l'Etablissement Français du Sang, en place d’outils performants partagés entre le CHU et l’IUC le GCS des établissements publics de santé et le GCS des éta- mais aussi par des interfaces avec le centre de recherche blissements de santé privés de la région Midi Pyrénées. Ces publique en cancérologie (INSERM). partenaires ont une forte attente vis-à-vis de l’IUC. Cet enga- gement de l’ensemble des partenaires, élément majeur de ce A quand remontent les premières réflexions autour du projet, en fait toute sa spécificité. projet d’IUC ? M.B-R : Les premières réflexions ont suivi immédiatement le Cet outil est-il la reconnaissance par un projet architectural drame que Toulouse a connu le 21 Septembre 2001 par l'explo- de la coopération existante entre tous ces acteurs ? sion de l'usine AZF. Cette catastrophe a été un véritable trau- M.B-R : Je dirais qu’il en est la traduction. L’IUC abritera matisme pour Toulouse et sa région. Le Maire de Toulouse effectivement les activités de soins de l’Institut Claudius Re- d’alors, Philippe Douste-Blazy a voulu transformer ce lieu de gaud, une part importante de la cancérologie du CRHU, mais désolation en un site porteur d’espoirs pour la population. C’est également le réseau ONCOMIP qui réunit l’ensemble des dans ce contexte que le projet est né de dédier cet endroit à la établissements de santé de la Région, une partie de l’activité de lutte contre le cancer en y regroupant les forces vives de la l'Etablissement Français du Sang liée à la cancérologie, ainsi recherche privée en cancérologie, notamment les Laboratoires que les associations de lutte contre le cancer. Enfin les plateaux Pierre FABRE et SANOFI et de la recherche publique par techniques et de consultations seront ouverts aux médecins du l’installation du Centre de Recherche en Cancérologie de secteur libéral. L’Institut sera également par son architecture Toulouse, dépendant de l’INSERM. En mars 2004, Philippe étroitement liée à la recherche fondamentale, avec le Centre Douste-Blazy, devenu ministre de la santé, a annoncé la création de Recherche en Cancérologie de Toulouse géré par l’INSERM du cancéropôle de Toulouse, avec l’installation sur le site d’un dont le bâtiment mitoyen de l’IUC aura des services et de la hôpital dédié à la cancérologie. L'État a, immédiatement, logistique en commun. confirmé son soutien pour la construction en s’engageant sur son financement intégral à hauteur de 300 millions d'euros. En amont du projet architectural, vous avez rédigé les grandes lignes de votre projet d'établissement. Où en Quelles sont les particularités du projet ? êtes-vous de sa mise en route ? M.B-R :C’est un projet qui créé une véritable dynamique pour M.B-R : Le Professeur Michel ATTAL, Chef de service d’Héma- tous les acteurs concernés, mais aussi qui va tirer vers le haut tologie du CHRU de Toulouse, et depuis Janvier 2012 Directeur tous les établissements de santé de la Région dans un objectif Général de l’Institut Claudius Regaud a été chargé en février commun d’excellence de la prise en charge du patient et de 2011 par le Ministre de la Santé d’élaborer le Projet Médical, et contribution de tous au développement de la recherche clinique de conduire la préfiguration de l’organisation médicale du futur et fondamentale, scellé par une charte de partenariat. établissement. Nous travaillons en binôme, une vingtaine de De plus, une attention particulière sera portée à l’offre en soins chantiers ont été lancés que ce soit ceux du projet médical, de de support, et aux services rendus aux patients et à leurs l’organisation soignante, du projet social, du modèle économique familles tant par l’IUC que par les associations présentes sur le et financier, de la logistique et des équipements et du système site. d’informations. Nous coordonnons ces différents chantiers dans 105 lesquels travaillent les professionnels des deux établissements 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page5 L’IUC se trouve sur le site de l’Oncopôle. Qui sont les autres acteurs présents sur le campus ? M.B-R :L’Association Oncopôle qui assure le développement et la cohérence du campus, présidée par Pierre COHEN Maire de Toulouse et Président de Toulouse Métropole, la Fondation InnaBiosanté présidée par Philippe DOUSTE-BLAZY, l’Institut des Technologies Avancées des sciences du Vivant (ITAV), le Pôle de Compétitivité Cancer-Bio-Santé présidé par le Profes- seur MONTORIOL, la recherche publique avec des équipes INSERM et CNRS, la recherche privée avec les Laboratoires Pierre FABRE et SANOFI, les associations d’usagers notamment la Ligue contre le cancer et l’Association CRIC qui gère la résidence hôtelière FLUVIA installée à proximité immédiate de l’IUC qui accueillera les patients ambulatoires mais aussi les familles qui le souhaitent. D’autres projets d’installation sont en cours mais pas suffisamment aboutis pour les citer. Les échanges seront-ils favorisés du fait de cette proximité avec les industriels ? M.B-R :Nous espérons bien évidemment que cette proximité renforce les échanges avec la recherche privée très impliquée dès l’origine du projet. Ils accueillent déjà des équipes mixtes INSERM/CNRS. Nous souhaitons bien sûr le développement des collaborations en matière de recherche avec les industriels du site dans un cadre réglementé. Comment voyez-vous l’évolution de la prise en charge du cancer avec ce nouvel outil ? M.B-R : Ce nouvel outil doit déjà permettre pour les patients une grande lisibilité sur l’organisation de la cancérologie publique toulousaine par une répartition des activités entre le CHU et l’IUC évitant ainsi toute concurrence entre les deux établissements, mais aussi au niveau régional. L’unicité de lieu doit favoriser les échanges entre spécialistes de la cancérologie qu’ils soient médecins ou chercheurs. Les activités communau- taires partagées entre tous les établissements publics et privés de MIP en feront un lieu de concertation pour tous les méde- cins. Il permettra aussi l’inclusion de plus de patients dans les essais de phase 1, 2 et 3 et la constitution d’un Centre de Recherche Biologique de haut niveau alimenté par l’ensemble des établissements. Enfin l’IUC se positionne pour pouvoir à terme offrir aux patients des traitements par protonthérapie. Cet établissement se doit d’être un modèle dans la prise charge du cancer par le niveau d’excellence des soins qui y seront prodigués et par l’accessibilité aux traitements innovants. Les multiples collaborations qui se créeront au quotidien entre les professionnels partageant le même objectif sera un des facteurs de réussite du projet, et pour ce faire l’Institut Univer- sitaire du Cancer doit devenir à terme la maison commune de tous les acteurs œuvrant pour une même cause, la lutte contre le cancer. 106 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page6 Architecture hospitaliere - numéro 5 - novembre 2012L’Institut Universitaire du Cancer 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:02 Page8 Le volet technique Le bâtiment a été organisé pour permettre la construction de manière très imbriquée des laboratoires de l'INSERM et du CNRS en lien et en continuité étroite de nos zones de laboratoires et de recherche clinique. Nous aurons deux zones sur le bâtiment, une zone tournée vers les professionnels et une zone publique (le soin). Concernant cette dernière, on trouve naturellement au Propos recueillis auprès de François Le rez-de-chaussée l'ensemble des consultations (consultations de Clézio, Ingénieur spécialités ou consultations indifférenciées), le plateau d'ima- Pouvez-vous nous présenter le site de Langlade où est gerie, le plateau de médecine nucléaire et le plateau de radio- implanté l’IUC ? thérapie avec sept appareils. Au premier étage, autour du bloc François Le Clézio : Le site de Langlade est une ancienne opératoire composé de sept salles, et de 2 salles de curithérapie, enclave industrielle tournée vers la chimie, en bordure de nous retrouvons un ensemblede réanimation et de soins médi- Garonne. Ce site présente l’intérêt d'être à 3 à 4 km à vol caux continus de 12 lits, une unité de chirurgie ambulatoire de d'oiseau du Capitole de Toulouse. Ces terrains se sont indus- 15 places, ainsi qu’un ensemble d'hébergements de soixante dix trialisés depuis les années 20 en particulier avec la présence lits. Au deuxième niveau,essentiellement dédié à des activités de Sanofi. Enfin, l’idée était de faire de ce lieu de désespoir, marqué d'hôpital de jour de médecine, nous avons environ 80 places par la catastrophe de l’usine d’AZF en 2001, un endroit d'espoir. dont 20 lits dédiés aux essais cliniques. Ces lits marquent l’affir- Le projet a été confirmé par Philippe Douste-Blazy en 2004. mation d’un établissementtrès orienté vers la recherche. Enfin, au dernier étage, nous retrouvons la médecine avec d’une part Le projet architectural dans ses grandes lignes… un ensemble de lits conventionnels et d’autre part un secteur F.L.C :Le projet architectural est fondé sur un programme fonc- d'accueil des patients d'hématologie nécessitant un environne- tionnel rédigé en 2006/2007 sur la base d’un projet médical qui ment technique très complexe (traitement d’air). Entre la zone s’est bien affiné depuis. Ainsi, le projet regroupe, sur un même publique et la zone professionnelle qui accueillera outre les site, les trois types de prise en charge autour de la cancérologie chercheurs ou les personnels de laboratoire et administratifs, :les radiations (radiothérapie, médecine nucléaire, imagerie), nous avons prévu une «zone de liaisons ou de partage», qui re- la chirurgie et la médecine. Nous installons 306 lits et places groupera les salles de réunions ainsi que les salles d’enseigne- ainsi qu’un plateau de consultation. Un tiers des capacités d’hé- ment pour les formations universitaires, professionnelles et 109 bergement est dédié à l’ambulatoire de chirurgie et de médecine. continues en cancérologie. 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:03 Page9 Quels seront ses atouts majeurs ? sur un niveau les hôpitaux de jours et les hébergements sur F.L.C :Le premier atout est d'offrir un bâtiment à la pointe de la deux niveaux par spécialité, nous sommes sur une logique technologie et, surtout, de regrouper sur un même site toutes verticale au niveau des plates-formes technologiques. Nous les technologies autour de la médecine, de la chirurgie et des allons donc retrouver « empilés » différents plateaux techniques, radiations. L’architecture l’exprime car l’ensemble de ces tech- pour apporter des réponses rationnelles aux problématiques niques de pointe est installé dans des bâtiments rigoureusement techniques liées à la ventilation ou à l’électricité. Ainsi, nous organisés et orthonormés, alors que les zones d’hébergement retrouvons au rez-de-chaussée l'imagerie, la radiothérapie et la sont installées dans des bâtiments courbes. Le second est médecine nucléaire puis, au-dessus, le bloc opératoire et les locaux d’avoir installé dans un continuum physique des activités de techniques de ventilation puis, encore au-dessus, des chambres soin, de recherche clinique et de recherche fondamentale. Le d'hématologie hautement protégées. troisième est d’être au cœur de cette zone d’aménagement, avec pour voisins des laboratoires pharmaceutiques d’enver- Êtes-vous aidés par les établissements partenaires dans gure et d’autres partenaires (association, start up, résidence le cadre de toutes les technologies qui vont être intégrées hôtelière, etc.), tous ces acteurs étant axés sur la lutte contre à l’IUC ? le cancer et la prise en charge de ces patients. F.L.C :Concernant des technologies innovantes liées aux soins, le bâtiment va forcément s'adapter aux équipements techniques Au niveau du projet architectural, qui avez-vous associé lourds que nous allons mettre en œuvre. Nous avons basé notre aux réflexions ? bilan budgétaire sur une acquisition majoritairement à neuf des F.L.C : Ce projet a été construit sur la base d’un programme mé- équipements structurants. Quoi qu'il en soit, nous aurons un dical en associant au fil du temps tous les professionnels, selon certain nombre d'équipements que nous récupérerons dans les l’utilisation ultérieure des locaux, en premier lieu les deux établissements. Il s'agira d’éléments lourds, coûteux, non amortis partenaires majeurs de l’IUC, à savoir l'Institut Claudius Regaud venant du CHU et de l'Institut Claudius Regaud, principalement et le CHU de Toulouse, et en second lieu les autres partenaires, des appareils de radiothérapie et des équipements de laboratoire des hôpitaux publics de la région, cliniques privées, universités, de biologie et d’anatomopathologie. l’établissement français du sang et le réseau Oncologie Midi Pyrénées (ONCOMIP). Comment avez-vous géré les différents flux au sein de l’IUC ? Qui sont les architectes ? Quels éléments de leur projet F.L.C :Cette gestion des flux est une constante absolue pour un vous ont séduits ? concepteur d'hôpital : comment différencier le flux logistique, le F.L.C :Pour la partie architecturale, le groupement est composé flux patient et le flux de visiteurs ? Dans le futur établissement, de Jean-Paul Viguier, architecte mandataire associé à Gérard ces trois flux vont trouver naturellement leur propre cheminement Huet. Le bureau d’étude est SIRR Ingénierie, une émanation du et vont peu se croiser. La réponse architecturale a été intéres- groupe SNC Lavalin. L’équipe est complétée d’un économiste, sante malgré la complexité du terrain qui n’a pas de sous-sol Mazet et associés. Ils ont répondu en respectant précisément du compte-tenu de son caractère inondable. Ainsi, le visiteur ne va programme. Ils ont réussi à transcender le programme pour jamais croiser le patient couché et le flux logistique. Ce dernier identifier cet élément fort qu’est le lien entre la recherche, a été ramené sur l'arrière du bâtiment et pourra croiser, en l’échange et l’enseignement. Enfin, le Jury a apprécié la qualité revanche, quelques circuits professionnels. d’accueil des patients, la qualité des chambres proposées et par la rigueur apportée sur les espaces techniques. Existe-t-il un fil conducteur dans ce projet architectural ? F.L.C :Quand nous regardons le projet sur plans, nous comprenons très bien les différents éléments de flux et d'assemblage entre les différentes fonctions. Je pense à la plate-forme dite d'échanges qui est à la fois un lieu de transfert où circuleront les flux mais aussi un lieu de rencontres ponctué d’atrium pour les personnes qui pourront ainsi se voir et se croiser. Pour ce bâti- ment qui est relativement étalé, ce lien sera important pour bien comprendre comment sont liées les différentes fonctions. La prise en charge du cancer nécessite des plateaux techniques de haute technologie, aussi bien diagnostiques que thérapeutiques. Comment sont-ils articulés ? F.L.C : Ils sont organisés par spécialités autour de la radiation, de la chirurgie et de la médecine. S’il existe un accueil du patient 110 qui se fait selon une logique horizontale, au RDC les consultations, 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:03 Page10 Architecture hospitaliere - numéro 5 - novembre 2012L’Institut Universitaire du Cancer 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:03 Page12 Architecture hospitaliere - numéro 5 - novembre 2012L’Institut Universitaire du Cancer Quelle est la place de la logistique ? halte. Nous avons également fait un travail pour avoir un vrai F.L.C :Le CHU a recours à une plate-forme logistique externe parc arboré. Nous travaillons sur diverses thématiques qui pour- gérant l'ensemble des achats et des distributions sur les diffé- raient se jouer à l’extérieur en lien avec la nutrition, l’idée d’un rents sites. Il s’agit pour nous d'être novateur et de répondre à jardin aux plantes aromatiques fait son chemin. cette problématique logistique en utilisant les meilleures solu- tions de chacun des partenaires. Ainsi, plusieurs questions se Dans quelle mesure la sécurité a-t-elle été prise en posent. Comment acheter avec le CHU ? En totalité ou partiel- compte ? lement ? Comment organiser les flux de blanchisserie, de stéri- F.L.C : Le domaine est clos et sécurisé. Nous avons voulu des lisation, de cuisine ou de pharmacie ? L’objectif est d’acheter clôtures les plus sobres et les plus discrètes possibles, le but au meilleur coût, afin que les ressources soient principalement n’étant pas d'empêcher l'intrusion mais de la dissuader. L'hôpital consacrées aux soins et à la recherche. Nous avons donc une n'est pas une par forteresse et doit être ouvert à tous. Nous analyse au cas par cas, objet par objet, pour trouver la solution avons essayé de gérer au mieux les accès au bâtiment et nous la plus optimale possible. avons prévu qu’un seul accès avec l’entrée principale. A l’intérieur, en revanche, toutes les zones professionnelles sont toutes sous De quelle manière avez-vous mis l’accent sur le confort contrôle d’accès par badge. hôtelier ? F.L.C :La qualité de la prise en charge des patients passe par Dans le cadre de votre futur système d'information, la qualité des espaces mis à leur disposition. Un travail important quelles sont les technologies retenues ? a été fait autour de la chambre d’hospitalisation par la mise en F.L.C :Au niveau de la construction, nous avons opté pour une œuvre d’une chambre témoin en particulier. Un soin particulier infrastructure qui doit répondre aux exigences du futur système a été porté sur les vues sur l'extérieur, en mettant en œuvre des d'information. Pour la circulation de ces informations, nous grandes baies vitrées. Nous allons jouer sur les couleurs les avons opté pour des solutions sur IP de manière systématique. éclairages, la luminosité. L’usage du bois assez chaleureux est Par ailleurs, les patients auront à leur chevet un terminal mul- assez récurrent. Nous allons également travailler sur le mobilier. timédia leur permettant de regarder la télévision, d’écouter la Dans ce contexte, nous avons des discussions et des réflexions radio et d’accéder à différents services sur Internet. Enfin, en constructives avec l’architecte. L’idée est d’avoir une grande termes de mobilité, le Wifi sera généralisé dans l’ensemble du sobriété dans tous les éléments immobiliers afin de les rendre bâtiment. pérennes dans le temps puis de travailler sur les types de mobilier et les couleurs que nous pourrons faire évoluer La réalisation de ce nouvel établissement intègre-t-elle régulièrement au fil des années. une notion de développement durable ? F.L.C : Nous n’avons pas, à proprement parler, recherché la qua- Au niveau de ce confort hôtelier, qu’est-ce qui différencie lification HQE mais il nous a semblé important de suivre cette la prise en charge des patients atteints de cancer d’une notion. Ainsi, dès le début du projet, nous avons intégré la grille prise en charge plus « classique » à l’hôpital ? réglementaire des 14 cibles HQE et, à chaque fois que nous F.L.C :Il existe diverses typologies de séjours de patients. Nous avons pris une décision, nous l’avons évalué à cette aune. avons les patients d'hématologie dans des chambres hautement protégées, c'est-à-dire dans un univers stérile, qui séjournent Avez-vous innové en matière d’énergie ? trois à quatre semaines et qui n'ont pas le droit de sortir et peu F.L.C : En matière d'énergie, plusieurs solutions s'offraient à de contact direct avec l'extérieur. Nous devons donc leur donner nous. Il nous a semblé intéressant de faire appel à l'extérieur et ce lien et leur apporter une attention particulière. Ensuite, nous d'acheter les calories et les frigories sur le marché en faisant avons les patients qui viennent régulièrement, de manière fré- appel à un prestataire extérieur choisi au terme d’un appel d’offres. quente, en hôpital de jour pour des séances de radiothérapie Nous avons tenu également à utiliser de l’énergie dite fatale ou de chimiothérapie récurrentes. Il s’agit de passages brefs. car issue de l’incinération d’ordures ménagères avec un très Ces patients doivent pouvoir retrouver des éléments de quoti- bon bilan carbone et en avons fait une clause majeure de notre dienneté et doivent pouvoir se sentir chez eux à chaque fois appel d’offres. Nous prévoyons aussi l’usage d’énergie solaire qu’ils reviennent dans l’établissement. Enfin, nous avons pour l’eau chaude sanitaire. l'accueil traditionnel en chambre qui est similaire à celui d’un hôpital général. Notre établissement doit d’emblée évoquer une sérénité de nature à apaiser les patients dans ces périodes de vie difficiles et inquiétantes. Les aménagements extérieurs et les espaces verts… F.L.C :Nous avons de larges espaces verts qui seront traités dans l'esprit de la zone du canceropôle. Le bâtiment sera très ouvert sur l'extérieur et cette ouverture permettra aux patients 113 de déambuler dans un grand parc avec des aires de repos et de 2-MAGAZINE ARCHI - N°5-2012_Mise en page 1 03/12/12 09:03 Page13 La restauration a-t-elle été un point important à déve- lopper ? F.L.C :La restauration est un point très important car participant de l’équilibre et de l’accueil du patient. C’est un élément d’accompagnement de sa thérapie. Historiquement l’Institut Claudius Regaud utilise un modèle de liaison chaude qui fonc- tionne bien et que les patients apprécient. De son côté, le CHU a développé des nouvelles modalités de prise en charge des repas en tissant des liens particuliers avec les industriels de l’agro-alimentaire. Après des discussions avec les 2 partenaires, nous sommes arrivés à trouver une solution mixte faisant appel de manière importante au dispositif mis en place au CHU avec des liaisons froides de qualité mais avec une grande possibilité d'adaptation dans les différentes unités. Dans quelles proportions cet institut est-il évolutif ? F.L.C :Nous avons sur la base du projet retenu par le jury, travaillé sur une régularité de trame c'est-à-dire de largeur de bâtiment pour les parties tertiaires et laboratoire, permettant une évolution ultérieure. Nous avons généralisé une trame structurelle poteaux poutres de 7,2m par 7,2m en excluant au maximum les murs en béton. Par ailleurs, le projet retenu propose des unités de soins en continuité les unes des autres permettant une variation de capacité entre elles. Quelle vision avez-vous de l’hôpital de demain en tant que technicien ? F.L.C : Le bâtiment n'est qu'un élément servant aux soins et au projet médical. Même s'il est important, le bâti ne reste qu'un attribut d'un établissement. Selon moi, l'hôpital est d’abord un projet médical qui doit pouvoir se développer dans un bâtiment le plus simple, le plus ductile possible et de manière primor- diale organisé autour des flux en limitant les pas des patients et des personnels. Pour être efficient, nous devons rationaliser nos méthodes de conception. Je pense à une rationalisation de la méthode, de la définition et de la validation de nos objectifs. Nous devons vraiment être très rigoureux, aller plus vite pour être efficace plus rapidement. Par ailleurs, le bâtiment hospitalier doit avoir une identité forte. Nous devons comprendre, dès le premier regard, quelle est la fonction d’un bâtiment. C'est vraiment un message que nous devons faire passer aux architectes. 114
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