République Algérienne Démocratique et Populaire Ministère de l’Enseignement Supérieur Et de la Recherche Scientifique Université Aboubakr Belkaïd - Tlemcen Faculté Des Lettres Et Des Langues Département des langues étrangères : français Doctorat Thème La dimension culturelle dans le discours argumentatif chez les apprenants du F.L.E. en Algérie. Analyse d’énoncés produits par les étudiants de 1ère année de licence de l’université de Tlemcen Présentée par : Sous direction de : M. BENGHABRIT Mohammed Tewfik M. BENMOUSSAT Boumediene Professeur, Université de Tlemcen Membres du jury : Mme. Fouzia SARI Professeur U. Oran Présidente M. Boumediene BENMOUSSAT Professeur U. Tlemcen Rapporteur M. Bentaifour Belkacem Professeur U. Alger Examinateur M. Mohammed HADJADJ AOUL Maitre de conférences U. Tlemcen Examinateur Mme. Hamidou Nabila Maître de conférences U. Oran Examinatrice M. Saadane BRAIK Maitre de conférences U. Mostaganem Examinateur Année universitaire : 2010 – 2011 SOMMAIRE Thème Page INTRODUCTION:…………………………………………………..................................... 1 CHAPITRE I : Approches/ Enseignement du FLE en Algérie / De la terminale à la 1ère année de licence……………………………………………. 18 I-1- Enseignement/Apprentissage du FLE en Algérie ……….…………………………. 19 I-2 Communication et discours………..…………………………………………………. 64 CHAPITRE II : Argumentation et approche culturelle…………………….…. 94 II-1- Approche argumentative………………………………………………………… 95 II-2- Approche culturelle et argumentation…………………………………………… 104 CHAPITRE III : Cadre méthodologique………………………….......................... 116 III-1- Argumenter dans une autre langue : méthodologie et analyse …. …………… 117 III-2- Langues et cultures : méthodologie et apprentissage……………………………. 137 III-3- Conception méthodologique et réalisation du corpus………………………….... 145 CHAPITRE IV : Analyse du discours argumentatif et de la dimension culturelle…………………………………………………………………… 174 IV-1- Analyse du discours argumentatif………………………………………………... 175 IV-2- Analyse des unités sémantiques évoquées dans le débat………………………… 205 IV-3- De l’oral à l’écrit : Analyse du discours argumentatif dans le débat et dans la production écrite……………………………………………..................... 232 IV-4-Application du schéma de Toulmin sur une séquence argumentative…………… 247 IV-5- Analyse de la compétence culturelle……………………………………………... 253 CHPITRE V : POUR UNE PRISE EN COMPTE DES COMPETENCES ARGUMENTATIVE ET CULTURELLE EN CLASSE DE LANGUE ………………. 269 CONCLUSION ………………………………………………………………………… 283 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………........... 290 ANNEXES………………………………………………………………………………. 312 TABLE DES MATIÈRES…………………………………………………………....... 422 INTRODUCTION L’enseignement du français langue étrangère occupe une place prépondérante dans le système éducatif algérien, c’est ce qui explique les dernières décisions politiques qui se sont soldées par l’introduction de l’enseignement du français, dès la troisième année primaire ainsi qu’une révision des programmes et des manuels scolaires. Nous nous intéresserons dans ce travail aux productions orales et écrites des étudiants de première année de licence et nous nous sommes basé sur une démarche empirique, plus précisément sur un recueil de données et une expérimentation, que nous expliquerons plus tard, et qui furent effectuées au sein du département des langues étrangères – filière de français - de l’université de Tlemcen. Nous analyserons des données à partir d’un corpus réalisé dans le cadre d’un module de première année, intitulé : PSL (Pratique systématique de la langue). Le choix de la première année universitaire n’est pas fortuit puisqu’il s’agit d’une année transitoire entre la classe de terminale et le début du cursus universitaire. Nous considérons que ces étudiants de première année universitaire sont dans le même continuum et nous analyserons donc leur production sans prendre en considération les changements opérés surtout ceux qui ont trait aux représentations que l’on peut se faire, tant chez l’étudiant que chez l’enseignant, sur l’enseignement du FLE dans le supérieur et sur le discours universitaire En effet, nous serons amené à étudier les compétences discursive, argumentative et culturelle chez les étudiants de première année de licence de français de l’université de Tlemcen et que nous présenterons dans un cadre très global, autrement dit, en occultant le clivage qui peut exister entre le cycle secondaire et la première année universitaire. Et pour ce faire, nous présenterons aussi, de manière succincte, le processus d’apprentissage de la production écrite au lycée et plus précisément, la mise en place d’une compétence argumentative en tenant compte de la prise de conscience quant à la dimension culturelle qui est très souvent mal perçue pour avoir été mal comprise ou mal enseignée. L’autre question qui revient à l’esprit est la suivante : pourquoi cette centration sur l’écrit lors des pratiques pédagogiques dans le secondaire algérien et ce, malgré l’intégration des approches communicative/actionnelle? Certes, l’application des nouveaux 1 programmes reste assez timide mais nous verrons dans ce travail que l’oral ne peut pas être occulté. Mieux encore, nous montrerons comment il peut être au service de la compétence scripturale. Si, pour entreprendre une formation qui a pour objet de préparer une licence de français langue étrangère, il est nécessaire de maîtriser, de manière plus ou moins correcte, les outils linguistiques et les mettre au service de la communication, sachant que l’objectif principal visé dans le secondaire algérien étant de réussir à l’épreuve du baccalauréat qui reste une évaluation certificative basée essentiellement sur la compétence écrite. Dans le secondaire algérien, même si l’oral est omniprésent lors des pratiques pédagogiques (mais en utilisant très peu de documents authentiques), l’enseignement est centré sur la compétence de l’écrit. En effet, les élèves/apprenants, durant leur cursus et à travers les différents plans de formation, subissent un enseignement basé sur la compréhension de l’écrit, le fonctionnement linguistique et la production écrite. Ainsi, les différentes activités proposées en classe de langue visent à préparer l’apprenant précisément à cette compétence, surtout lorsqu’on sait que l’évaluation à l’oral demeure absente lors des devoirs, des compositions ainsi qu’au baccalauréat, une épreuve qui ne sanctionne le candidat qu’à l’écrit et ce, malgré l’avènement de la pédagogie du projet dans le système éducatif en Algérie. Cela suppose t-il que les programmes officiels ne sont pas appliqués ? Qu’en est-il de la formation des formateurs ! Mais cela n’est pas le sujet de notre réflexion. En effet, si l’on se réfère à la finalité préconisée dans les textes officiels par l’institution de tutelle et qui stipule « qu’à la fin du cycle secondaire, l’élève sera un utilisateur autonome du français, instrument qu’il pourra mettre au service des compétences requises par la formation supérieure professionnelle, les entreprises utilisatrices et les contraintes de la communication sociale » ( voir fascicule des 2 programmes du secondaire algérien, 1996), l’on s’attend à une confirmation lors des épreuves du baccalauréat mais le constat d’échec demeure avéré. Si autrefois, L’enseignement du FLE dans le secondaire algérien était basé essentiellement sur l’unité didactique et que les programmes étaient construits sur la base des typologies textuelles (le texte narratif, expositif, argumentatif, descriptif…), aujourd’hui, les nouvelles réformes du système éducatif ont touché une nouvelle fois les approches et les méthodologies pratiquées dans l’enseignement/apprentissage du français langue étrangère en Algérie. On parle aujourd’hui « d’approche par les compétences » et les nouveaux programmes dans le secondaire sont en vigueur dans tous les niveaux ; cependant, l’opérationnalisation et la mise en œuvre d’une démarche communicative/actionnelle restent assez timides pour les raisons que nous ne citerons pas ici. Cependant, que ce soit dans les anciens ou dans les nouveaux programmes, la typologie du discours reste en vigueur et les instructions officielles insistent sur la maîtrise du discours écrit, même si l’oral aujourd’hui tend à reprendre la place qu’il devait occuper depuis longtemps. Quand on sait le lien existant entre la compréhension de l’écrit et l’expression écrite d’une part et entre la pratique de l’oral d’autre part, la maîtrise de l’un ne peut se développer sans la maîtrise de l’autre. En effet, la réalité a montré que les élèves/apprenants, même ayant « compris » les modes d’organisation des textes (par la « grâce » d’un savoir dispensé par l’enseignant), n’arrivent pas à s’exprimer, pour des raisons diverses, faisant que l’expression écrite reste le domaine de l’incapacité flagrante d’une quelconque maîtrise de la langue. Dans le cas qui nous intéresse, à savoir le texte/discours argumentatif produit par des étudiants de terminale sortants, nous aurons à décrire et à analyser les modes 3 d’organisation de leurs écrits quand le scripteur se trouve dans une situation de classe ou plus précisément lors d’un examen classique tel qu’un devoir semestriel ou d’une épreuve de rattrapage. Cependant, comme nous le verrons un peu plus tard dans ce travail, nous avons confronté cette tâche « classique », à savoir la production écrite, à une autre activité : l’argumentation dans le débat en classe. Par ailleurs, lors des cours dispensés aux étudiants de première année de licence de français dans les modules de « techniques d’expression orale et écrite » mais aussi celui de « la pratique systématique de la langue », nous avons pu observer depuis quelques années que le blocage à l’écrit continue et perdure. Cependant, nous avons remarqué aussi que ces étudiants qui, quelques mois seulement auparavant étaient en classe de terminale, ont un sérieux déficit aussi à l’oral, surtout quand il s’agit de s’exprimer et d’organiser des énoncés verbaux. Aussi, lors des nombreuses séances de cours auxquelles nous avons pu assister dans les lycées de la région de Tlemcen, à titre d’observations complémentaires, nous avons pu constater que dans la majorité des activités menées en classe de français, il arrive que l’enseignant monopolise les 80% du temps attribué à la séance. En effet, en suivant « religieusement » sa fiche de préparation, il rate l’essentiel : la part de l’apprenant dans son apprentissage, sa prise en charge par lui-même, son autonomie sur le plan langagier, sa manière de réfléchir, le développement et l’opérationnalisation de ses compétences, les moments opportuns où il doit prendre la parole, etc. En revanche, les entretiens que nous avons eus avec certains inspecteurs/formateurs de l’éducation nationale mais aussi avec des enseignants de lycée, étaient très révélateurs, dans la mesure où nous avons décelé les représentations que se font les uns et les autres sur l’enseignement/apprentissage de l’écrit et son lien étroit qu’il entretient avec l’oral. Cela nous a permis ainsi de comprendre le pourquoi des difficultés rencontrées par les candidats dans l’épreuve du baccalauréat concernant l’acte d’écrire; ces mêmes candidats devenant plus tard étudiants universitaires, vont traîner le même handicap lorsqu’on sait que, durant 4 tout leur cursus, la dissertation et les autres genres scripturaux constitueront inéluctablement le mode d’évaluation privilégié des enseignants universitaires. A cet effet, nous avons réservé une partie du premier chapitre pour présenter l’enseignement du FLE dans le secondaire algérien afin de voir la problématique de manière globale d’une part et d’avoir une idée plus précise sur ces étudiants de première année universitaire d’autre part.. Dans notre travail, nous nous attarderons donc sur la problématique de l’oral mais aussi de l’écrit qui reste le talon d’Achille pour l’apprenant algérien. Les projets d’écriture que tentent de réaliser les enseignants de lycée avec leurs élèves qui n’ont pas toujours l’occasion de prendre la parole lors des séances de préparation à l’écrit, restent pauvres au plan du discours et des idées développées où l’on remarque une absence quasi totale de l’engagement et du vouloir dire de la part du scripteur qui se limite à confectionner des énoncés qu’il juxtapose car, étant mis dans une situation de communication différée, il ne « joue pas le jeu » d’un énonciateur voire d’un co-énonciateur qui a envie de communiquer avec un destinataire qui n’est pas seulement un enseignant/correcteur. Dans les autres types de discours, le scripteur peut, plus ou moins, se créer des conditions d’écriture : quand on veut raconter une nouvelle, décrire un objet ou une personne ou présenter une situation quelconque; mais cela s’avère difficile quand on veut exprimer une opinion, argumenter et dissuader, dans le but d’attendre une réaction de la part du destinataire. Dans cette étude, nous présenterons la population concernée par l’enquête, leur spécificité, leur statut social et leur relation avec la langue française. Nous évoquerons aussi le statut assez particulier qu’occupe la langue française en Algérie et sa place dans l’éducation nationale mais aussi à l’université. D’un autre côté, nous évoquerons l’importance que revêt l’écrit dans les modes d’évaluation préconisés dans le système éducatif algérien ; c’est ce qui a motivé le choix de l’objet d’étude et la focalisation sur l’option de l’écrit mais aussi sa relation étroite avec l’oral. Ceci nous a amené à chercher la réponse aux questions suivantes : 5 pourquoi le choix de l’argumentation ? Pourquoi parler de discours argumentatif ? Quels liens existe-t-il entre l’oral et les activités interactionnelles relatives à son apprentissage d’une part, et son implication à l’écrit sur les plans énonciatif, discursif, communicatif et culturel d’autre part? Est-ce que le scripteur prend conscience de la dimension culturelle contenue dans les arguments qu’il avance ? Arrive-t-on à prendre du recul par rapport à ce que l’on présente comme argument ? Fait-on la différence entre un argument commun, puisé de l’imaginaire collectif, et sa propre opinion ? Pour ce faire, nous avons réalisé une pré-enquête en enregistrant une série d’expériences dans plusieurs lycées de la région de Tlemcen et qui consistaient à mettre l’apprenant dans une situation d’interaction orale pour préparer une production écrite du type argumentatif. Dans toutes les expériences que nous avons menées, il était question à chaque fois d’un groupe témoin (une vingtaine d’élèves environ), alors que le reste de la classe suivait les cours normalement, tels qu’ils sont dispensés dans le cadre du projet. C’est à partir des résultats préliminaires que nous avons privilégié une activité particulière qui nous a paru essentielle pour préparer les apprenants à la production écrite : le débat car, à travers cet exercice, nous avons remarqué que l’apprenant se prête au jeu de l’interaction et, au sein du groupe, il arrive non seulement à apprendre des autres mais aussi à profiter de l’opportunité qui lui est offerte pour libérer sa parole, développer ses idées dans une langue qui paraît fragile au départ mais qu’il assume très vite, au fur et à mesure que le « jeu » prend de l’ampleur. La situation de communication dans laquelle l’apprenant se trouve commence à ressembler tant à la réalité qu’elle devient tés vite tout à fait réelle : le « je » d’énonciation dans lequel s’engage le participant va prendre plus de sens dans l’argumentation qu’il développe lors du débat par exemple et, comme nous le verrons dans le chapitre réservé à l’analyse du discours produit par des apprenants de première année universitaire, la visée communicative est prise en charge de manière plus effective et plus engagée par rapport à la tâche d’écriture qui suivra le débat : l’argumentation avait alors plus de sens pour les apprenants et elle en avait encore davantage à l’écrit. 6 Concernant notre travail, nous nous focaliserons donc, lors de l’analyse, uniquement sur une expérience menée au département de français avec des étudiants de première année de licence. A cet effet, la démarche de recherche que nous avons adoptée est empirique et qualitative : Elle est empirique dans la mesure où, d’un côté elle porte sur des données que nous avons recueillies en situation : celles-ci correspondent à un corpus oral constitué par la transcription d’une activité communicative enregistrée en contexte didactique et un autre écrit, réalisé lui aussi en classe de langue et qui consiste en des données récoltées dans les productions argumentatives des étudiants. D’autre part, la démarche adoptée se caractérise avant tout par l’observation et la description d’une réalité. Elle est qualitative parce qu’elle se base essentiellement sur une analyse interprétative de données, en l’occurrence les conduites des interactants. Nous rejoignons ainsi A. Mucchielli qui considère la méthode qualitative comme : « Une succession d’opérations et de manipulations techniques et intellectuelles qu’un chercheur fait subir à un objet ou phénomène humain pour en faire surgir les significations pour lui-même et les autres hommes. Dans une méthode qualitative, on distingue classiquement la phase de recueil et la phase de traitement des données. […] La spécificité fondamentale des méthodes qualitatives vient de leur inscription dans le paradigme compréhensif (ou subjectiviste ou encore interprétatif).» (2004 : 212-213) Nous nous sommes inspiré donc de la démarche empirique et qualitative pour mener à bien l’expérience que nous avons réalisée avec quarante étudiants de première année de licence de français qui ont subi tous ensemble une épreuve de production écrite portant sur le discours argumentatif, sachant que vingt d’entre eux avaient participé au préalable à un débat oral portant sur le même sujet et relatant une problématique d’ordre culturel. 7
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