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Arnobe: Contre les gentils: Livre I PDF

462 Pages·1982·15.63 MB·French
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CONTRE LES GENTILS « ARNOBE CONTRE LES GENTILS Il a été tiré de cet ouvrage: 100 exemplaires sur papier pur fil Lafuma numérotés de 1 à 100 COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE publiée sous le patronage de l’ASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ ARNOBE CONTRE LES GENTILS LIVRE I TEXTE ÉTABLI, TRADUIT ET COMMENTÉ PAR Henri LE BONNIEG Professeur à l’Université de Paris-Sorbonne publié avec le concours du Centre National de la Recherche Scientifique PARIS SOCIÉTÉ D’ÉDITION «LES BELLES LETTRES » 95, BOULEVARD RASPAIL R 0 R b es > 'j Ht 3 35- i v -t. i Conformément aux statuts de l’Association Guillaume Budé, ce volume a été soumis à l’approbation de la commission technique, qui a chargé M. René Braun d’en faire la révision, en collaboration avec M. Henri Le Bonniec. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou repro¬ duction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants-droit ou ayants-cause, est illicite » (Alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal. (g) Société d’édition « Les Belles Lettres », Paris, 1982 ISBN : 2-251-01014-9 ISSN : 0184-7155 INTRODUCTION I. Éléments biographiques L’écrivain que nous appelons Arnobe1 n’avait pas les tria nomina ; en tout cas, les textes ne le connaissent que sous le nom d’Arnobius2. C’est pour cette raison, et aussi en se fondant sur l’étymologie, que certains pensent qu’il était d’origine grecque ; sans aucune certitude3. Il savait certainement le grec, comme le montre la lecture de son traité, mais cela prouve seulement qu’il était cultivé — et nous allons voir que son métier lui en faisait une obligation. Nous ignorons le lieu, la date, les circonstances de sa naissance et de sa mort. La critique externe en est réduite à examiner 1. Cette Introduction doit beaucoup à l’admirable chapitre, qui a si peu vieilli, consacré à Arnobe par P. Monceaux, Histoire littéraire de l'Afrique chrétienne, t. 3, Paris, 1905, p. 241-286 (cité ci-dessous « P. Monceaux ») ; l’excellente Introduction de George E. McCracken, en tête de sa traduction (1949) a été, elle aussi, constamment utilisée (cité « McCracken »). Pour les livres ou articles cités en abrégé dans les notes, on trouvera les références complètes dans la Bibliographie ci-dessous p. 109 sqq. 2. La forme Arnobius est attestée par Jérôme ; voir ci-après. Mais les explicit de chaque livre dans le Parisinus donnent Arnouii (génitif), par suite de la confusion fréquente entre le b et le u. 3. Cf. U. Moricca, Storia delta lelteralura latina cristiana, Turin, 1923, 1, p. 607 : « il suo nome, interamente greco, ha indotto alcuni a pensare ch’egli appartenesse a una famiglia origi¬ naria délia Grecia ». McCracken, p. 5 et p. 241, n. 23, cite, lui aussi, pour la première partie du nom d’Arnobe les noms grecs Apveoç, ’ApvÊaç, ’ApviàSaç, "ApviTrjcoç, etc. ; pour la seconde partie MyiXôSloç, ZvivôSioç, etc. Il renvoie à A. Reifferscheid, Analecta critica, Index Lecl. Hib., Breslau, 1877, p. 9 sq. et à O. Barden- hewer, Geschichte der altkirchlichen Literaiur, 2, Fribourg en Br., 1914, 4. 518, sans prendre lui-même position. 8 INTRODUCTION à la loupe quelques maigres témoignages de saint Jérôme : « Sous le règne de Dioclétien » (donc entre 284 et 305), « Arnobe enseigna brillamment la rhéto¬ rique à Sicca, en Afrique, et il écrivit contre les païens des livres qu’on trouve encore un peu partout »1. «Arnobe jouit comme rhéteur d’une grande réputation en Afrique. Au temps où il initiait à la déclamation la jeunesse de Sicca, étant encore païen, des songes le forcèrent à embrasser la foi (chrétienne) ; n’obtenant pas de l’évêque (le droit) de partager une croyance qu’il avait toujours combattue, il élabora des livres pleins de talent contre son ancienne religion et enfin, ayant ainsi fourni pour ainsi dire des gages de sa piété, il obtint son affiliation (foedus) »2. Personne ne doute sérieusement qu’Arnobe ait été professeur de rhétorique ; il est d’ailleurs appelé orator dans Yexplicit du livre 4 du Parisinus. Mais il suffit de le lire pour se persuader que notre homme avait épousé la rhétorique, pour le meilleur et pour le pire ; si parfois il dit du mal de cette vieille compagne, il n’a jamais envisagé le divorce3. On admet souvent qu’il était né à Sicca Veneria, où il enseigna ; c’est en effet probable, car cette ville n’était pas assez importante pour attirer un rhéteur étranger4. 1. De uiris illusl. 79 : Arnobius sub Diocletiano principe Siccae apud Africam florentissime rhetoricam docuit scripsilque aduersus gentes quae uulgo exstant uolumina. Cf. 80 Firmianus, qui et Lactantius, Arnobii discipulus, sub Diocletiano principe. 2. Chron. Helm p. 231, 14 Arnobius rhetor in Africa clarus habetur. Qui cum Siccae ad declamandum iuuenes erudiret et adhuc ethnicus ad credulitatem somniis compelleretur neque ab episcopo impetraret fidem, quam semper impugnauerat, elucubrauit aduersus pristinam religionem luculentissimos libros et tandem uelul quibus¬ dam obsidibus pietatis foedus impetrauit. 3. Voir ci-dessous, Introd., p. 86 sqq. 4. C’est l’avis de McCracken, p. 7 et n. 40, p. 242 sq., qui cite 1 opinion positive de divers critiques ; sur Sicca Veneria, en Numidie Proconsulaire, auj. El Kef, en Tunisie, cf. Dessau, dans R.E., s.v. col. 2187-8. — Il semble superflu de se demander avec McCracken (p. 7) pourquoi Arnobe n’a pas tiré argument dans sa polémique de l’existence à Sicca d’un temple de Vénus où les femmes puniques se prostituaient, avant leur mariage, INTRODUCTION 9 On. a mis en doute le rôle joué par des songes dans la conversion : Arnobe (1, 46, 8) parle de uana somnia ; ailleurs (7, 39), il raconte comment Jupiter apparut en songe à un paysan ; enfin, dans le seul passage (1, 39) où il fasse allusion à sa conversion, il ne souffle mot de ces rêves qui l’auraient déterminé1. Ces arguments ne sont pas convaincants ; Arnobe ne dit pas que tous les songes sont vains, au contraire ; dans son récit, le paysan qui n’a pas tenu compte de l’avertissement de Jupiter est cruellement puni par le dieu. D’autre part, l’apologiste n’a fait aucune confidence sur les motifs de sa conversion ; son silence sur les songes ne suffit pas à en infirmer l’existence. D’excellents juges ont pensé qu’il fallait sur ce point faire crédit au témoignage de Jérôme. « Étant donné l’homme et les idées du temps, la réalité de ces songes n’a rien d’invraisemblable » (P. Monceaux, p. 244). J. H. Waszink2 rappelle qu’aux ne et me siècles on attachait beaucoup d’importance aux rêves, et que ceux-ci ont dû jouer un rôle dans les conversions, puisque selon Tertullien [De anima 47, 2), maior paene uis hominum ex uisionibus (— somniis d’après le contexte) deum discunt3. En cette « époque d’anxiété », si bien caractérisée par E. R. Dodds4, tout afin de gagner leur dot (Val. Max., 2, 6, 15), étant donné que « it seems difficult to believe that even a professor of rhetoric could hâve been ignorant of the temple, has he really lived in Sicca o (!). 1. Arguments allégués par Oehler et Bryce-Campbell, cf. McCracken, p. 15. 2. Dans son c. r. de l’éd. de McCracken, Vig. Christ. 4, 1950, p. 118. 3. Selon Lactance, De opif. Dei 18, 9, Dieu a recours aux songes pour instruire les hommes : facultatem sibi reliquit docendi hominem futura per somnium (texte cité par J. R. Laurin, Orien¬ tations..., p. 419, n. 11). Suries songes dans la tradition chrétienne, cf. M. Dulaey, Le rêve dans la vie et la pensée de Saint Augustin, Paris, 1973, surtout p. 49-68 (p. 57 sur Arnobe). 4. E. R. Dodds, Pagan and Christian in an Age of Anxielg..., p. 38 sqq. — Pour se rendre compte de la place que tenaient les songes et leur interprétation dans la vie des anciens, consulter La clef des songes d’Artémidore, dans la traduction de 10 INTRODUCTION le monde prenait les songes au sérieux, aussi bien les chrétiens que les païens : « Gertainly, of ail modes of contact with the supernatural, dreaming... was in antiquity, the most widely practised » (p. 38). Selon Origène1, « beaucoup sont venus au christianisme comme malgré eux, un certain esprit ayant soudain tourné leur cœur de la haine de la doctrine à la résolution de mourir pour elle, en leur présentant une vision ou un songe. J’en ai connu bien des exemples ». Ces paroles s’appliquent exactement à la conversion d’Arnobe, vue par Jérôme. Nous ignorons tout de la nature et du contenu de ces somnia, mais ils traduisaient naturellement les préoccupations, les inquiétudes, les aspirations du futur converti. On s’est demandé quelles avaient été les véritables causes de sa conversion ; celles qui ont été proposées sont de nature diverse, mais ne s’excluent pas ; elles n’ont rien d’arbitraire, car, à défaut d’une confession de l’intéressé, elles se fondent sur des inter¬ rogations minutieuses de son œuvre. Donnons-en un aperçu, sans pouvoir ici entrer dans le détail. P. Monceaux a bien mis en lumière la désillusion pro¬ fonde qui avait plongé cette âme assoiffée de vérité dans le plus profond désarroi : « Arnobe avait exploré curieusement la théologie païenne, les mystères, les religions exotiques. Il portait dans ces études des préoccupations morales et demandait aux théologiens comme aux philosophes une règle de vie. En même temps, il était crédule, et voulait croire à tout prix. Il revint très déçu de ses longues excursions mystiques ; ce dévot s’effraya en constatant qu’il tombait dans le scepticisme. En maint endroit de son Apologie et dans A. J. Festugière, Paris, 1975. Indications bibliographiques, p. 9 sur le rôle des songes dans l’antiquité. 1. Nous citons ce texte, auquel Dodds renvoie, d’après la trad. M. Borret, Contre Celse, 1, 46, t. 1, p. 197. Dodds, p. 46, n. 2, remarque : « for action in obedience to a dream Christians had the example of St Paul, Acts 16, 9 sq. » (celui-ci part pour la Macédoine, à la suite d’une vision nocturne).

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